Sont seuls compétents, sans considération de domicile:
1) en matière de droits réels immobiliers et de baux d'immeubles, les tribunaux de l'État membre où l'immeuble est situé.
Toutefois, en matière de baux d'immeubles conclus en vue d'un usage personnel temporaire pour une période maximale de six mois consécutifs, sont également compétents les tribunaux de l'État membre dans lequel le défendeur est domicilié, à condition que le locataire soit une personne physique et que le propriétaire et le locataire soient domiciliés dans le même État membre;
2) en matière de validité, de nullité ou de dissolution des sociétés ou personnes morales ayant leur siège sur le territoire d'un État membre, ou de validité des décisions de leurs organes, les tribunaux de cet État membre. Pour déterminer le siège, le juge applique les règles de son droit international privé;
3) en matière de validité des inscriptions sur les registres publics, les tribunaux de l'État membre sur le territoire duquel ces registres sont tenus;
4) en matière d'inscription ou de validité des brevets, marques, dessins et modèles, et autres droits analogues donnant lieu à dépôt ou à un enregistrement, les juridictions de l'État membre sur le territoire duquel le dépôt ou l'enregistrement a été demandé, a été effectué ou est réputé avoir été effectué aux termes d'un instrument communautaire ou d'une convention internationale.
Sans préjudice de la compétence de l'Office européen des brevets selon la convention sur la délivrance des brevets européens, signée à Munich le 5 octobre 1973, les juridictions de chaque État membre sont seules compétentes, sans considération de domicile, en matière d'inscription ou de validité d'un brevet européen délivré pour cet État;
5) en matière d'exécution des décisions, les tribunaux de l'État membre du lieu de l'exécution.
[Sont seuls compétents, sans considération de domicile:]
1) en matière de droits réels immobiliers et de baux d'immeubles, les tribunaux de l'État membre où l'immeuble est situé.
Toutefois, en matière de baux d'immeubles conclus en vue d'un usage personnel temporaire pour une période maximale de six mois consécutifs, sont également compétents les tribunaux de l'État membre dans lequel le défendeur est domicilié, à condition que le locataire soit une personne physique et que le propriétaire et le locataire soient domiciliés dans le même État membre;
Dispositif : "L’article 22, point 1, premier alinéa, de la convention [de Lugano II] doit être interprété en ce sens que ne constitue pas une action « en matière de droits réels immobiliers et de baux d’immeubles », au sens de cette disposition, une action diligentée par l’acquéreur d’un bien immeuble, visant le versement d’une somme perçue par le vendeur au titre du loyer payé par un tiers, alors que cet acquéreur, bien qu’entré en jouissance dudit bien au moment du versement de cette somme, n’en était pas encore légalement le propriétaire, selon la législation nationale applicable".
Dispositif (et point 33) : "L’article 22, point 1, premier alinéa, du règlement (CE) n° 44/2001 (…), doit être interprété en ce sens que relève de la catégorie des litiges «en matière de droits réels immobiliers» au sens de cette disposition une action en dissolution, au moyen d’une vente dont la mise en œuvre est confiée à un mandataire, de la copropriété indivise sur un bien immeuble".
Europe 2016, comm. 80, note L. Idot
RTD com. 2016. 362, note A. Marmisse-d'Abbadie d'Arrast
Aff. C-438/12, Concl. N. Jääskinen
Motif 43 : "en se référant au rapport sur la convention relative à l’adhésion du Royaume de Danemark, de l’Irlande et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord à la convention concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, ainsi qu’au protocole concernant son interprétation par la Cour de justice, élaboré par M. Schlosser (JO 1979, C 59/71, point 166), la Cour a rappelé que la différence entre un droit réel et un droit personnel réside dans le fait que le premier, grevant un bien corporel, produit ses effets à l’égard de tous, alors que le second ne peut être invoqué que contre le débiteur (voir ordonnance du 5 avril 2001, Gaillard, C‑518/99, Rec. p. I‑2771, point 17)".
Dispositif 1) (et motif 47) : " [...] l’article 22, point 1, du règlement n° 44/2001, doit être interprété en ce sens que relève de la catégorie des litiges "en matière de droits réels immobiliers" visée par cette disposition, une action, telle que celle intentée en l’espèce devant la juridiction d’un autre État membre, visant à faire constater l’invalidité de l’exercice d’un droit de préemption qui grève cet immeuble et qui produit des effets à l’égard de tous".
Procédures 2014, comm. 172, obs. C. Nourrissat
Europe 2014, comm. 285, obs. L. Idot
Rev. crit. DIP 2014. 704, note L. d'Avout
D. 2015. 1056, note H. Gaudemet-Tallon et F. Jault-Seseke
Dispositif (et motif 31) : "Le règlement (CE) n° 44/2001 (…), et notamment son article 22, point 1, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’applique pas à une procédure gracieuse engagée par un ressortissant d’un État membre, déclaré partiellement incapable à la suite de son placement sous le régime de la curatelle conformément à la législation de cet État, devant une juridiction d’un autre État membre en vue d’obtenir l’autorisation de vendre la partie dont il est propriétaire d’un bien immobilier, qui est situé sur le territoire de cet autre État membre, dès lors qu’une telle procédure relève de "la capacité des personnes physiques" au sens de l’article 1er, paragraphe 2, sous a), de ce règlement, laquelle est exclue du champ d’application matériel de celui-ci".
Rev. crit. DIP 2014. 182, note S. Corneloup
Procédures 2013, comm. 346, obs. C. Nourissat
Aff. C-420/07, Concl. J. Kokott
Motif 48 : "Il convient de constater que l’article 22 du règlement n° 44/2001 contient une liste impérative et exhaustive de fors de compétence judiciaire internationale exclusive des États membres. Cet article ne fait que désigner l’État membre dont les juridictions sont compétentes ratione materiæ, sans cependant répartir les compétences au sein de l’État membre concerné. Il appartient à chaque État membre de déterminer sa propre organisation juridictionnelle".
Motif 49 : "En outre, le principe de l’interdiction du contrôle de la compétence des juridictions de l’État membre d’origine, prévu à l’article 35, paragraphe 3, dudit règlement – ledit contrôle n’étant admis que par rapport aux dispositions du paragraphe 1 du même article –, empêche qu’un contrôle de la compétence interne des juridictions de l’État membre d’origine concerné soit effectué dans l’affaire au principal".
Motif 50 : "Par conséquent, la règle du forum rei sitæ prévue à l’article 22, point 1, du règlement n° 44/2001 concerne la compétence judiciaire internationale des États membres et non pas la compétence judiciaire interne de ceux-ci".
Motif 51 : "Dans l’affaire au principal, il est constant que l’immeuble est situé sur le territoire de la République de Chypre et que, partant, la règle de compétence prévue à l’article 22, point 1, du règlement n° 44/2001, a été respectée. Le fait que l’immeuble se trouve dans la zone nord peut éventuellement avoir une incidence sur la compétence interne des juridictions chypriotes, mais il ne saurait avoir aucune incidence aux fins de ce règlement".
Europe 2009, n° 262, obs L. Idot
Europe 2009, n° 213, obs. V. Michel
RLDA 2009, n°36, p. 75, obs. E. Bernadskaya
Rev. crit. DIP 2010. 377, note E. Pataut
Aff. C-343/04, Concl. P. Maduro
Motif 34 : "Une action en cessation de nuisances, le cas échéant de nature préventive, telle que celle en cause au principal, ne constitue pas davantage une contestation ayant pour objet un droit réel sur un immeuble. Certes, le fondement d’une telle action réside dans l’atteinte portée à un droit réel immobilier, mais la nature réelle et immobilière de ce droit n’a, dans ce contexte, qu’une importance incidente. Ainsi que l’ont souligné ČEZ et la Commission, cette nature réelle et immobilière du droit en cause n’exerce pas d’influence déterminante sur la configuration du litige au principal, qui ne se poserait pas en des termes substantiellement différents si le droit dont la protection est poursuivie contre les nuisances alléguées était d’une nature différente, tel que, par exemple, le droit à l’intégrité physique ou un droit mobilier. Tout comme l’action en cause au principal, de telles actions viseraient, en substance, à obtenir que celui qui se trouve à l’origine d’une telle atteinte, avérée ou potentielle, à un droit, notamment pour n’avoir pas respecté l’état reconnu de la technique, soit sommé d’y mettre fin".
Dispositif (et motif 40) : "L'article 16, point 1, sous a), de la convention du 27 septembre 1968 (...), doit être interprété en ce sens que ne relève pas du champ d'application de cette disposition une action qui, à l'instar de celle engagée dans l'affaire au principal sur le fondement de l'article 364, paragraphe 2, du code civil autrichien (Allgemeines bürgerliches Gesetzbuch), vise à empêcher les nuisances affectant ou risquant d'affecter des biens fonciers dont l'auteur de cette action est propriétaire et provoquées par des rayonnements ionisants émanant d'une centrale nucléaire sise sur le territoire d'un État voisin de celui où ces biens sont situés".
Europe 2006, n° 229, obs. L. Idot
Procédures 2007, comm. 61, obs. C. Nourissat
RJ com. 2006. 337, obs. A. Raynourd
RDI 2006. 356, obs. F.-G. Trébulle
Aff. C-518/99, Concl. P. Léger
Motif 18 : "L'action en résolution d'un contrat de vente portant sur un immeuble, même si elle a, le cas échéant, une incidence sur la propriété dudit immeuble, n'en trouve pas moins son fondement dans un droit personnel que le demandeur tire du contrat conclu entre les parties et, en conséquence, elle ne peut être exercée qu'à l'encontre du cocontractant. En effet, par cette action, l'une des parties au contrat entend être libérée de ses obligations contractuelles envers l'autre partie en raison de l'inexécution du contrat par celle-ci et, en outre, la décision juridictionnelle statuant sur cette action n'est susceptible de produire des effets qu'à l'égard de la partie à l'encontre de laquelle la résolution a été prononcée. Ladite action n'a donc pas pour objet des prérogatives qui porteraient directement sur un immeuble et qui seraient opposables à tous".
Motif 19 : "Dès lors, l'action en résolution en cause au principal n'est pas une action en matière de droits réels immobiliers au sens de l'article 16, point 1, de la convention de Bruxelles, mais elle est une action personnelle".
Motif 20 : "Il en va de même de l'action en dommages et intérêts qui tend à l'indemnisation du préjudice qu'une partie prétend avoir subi du fait de la résolution d'un contrat de vente portant sur un immeuble en raison de l'inexécution de ses obligations contractuelles par l'autre partie au contrat".
Dispositif (et motif 22) : "L'action en résolution d'un contrat de vente portant sur un immeuble et en paiement de dommages et intérêts en raison de cette résolution ne relève pas du champ d'application de la règle de compétence exclusive, en matière de droits réels immobiliers, prévue à l'article 16, point 1, de la convention du 27 septembre 1968 (…)".
JDI 2002. 621, obs. A. Huet
RTD com. 2002. 207, obs. A. Marmisse
JCP 2001. 2261, note C. Bruneau
Aff. C-294/92, Concl. M. Darmon
Motif 14 : "L'article 16 attribue une compétence exclusive en matière de droits réels immobiliers aux juridictions de l' État contractant où l'immeuble est situé. De l'arrêt du 10 janvier 1990, Reichert et Kockler (C-115/88, Rec. I-27), qui avait à statuer sur l'applicabilité de cette compétence exclusive à une action intentée par un créancier en vue de faire déclarer que lui était inopposable un acte de disposition d'un immeuble que ce créancier soutenait avoir été effectué par son débiteur en fraude de ses droits, il résulte qu'il ne suffit pas qu'un droit réel immobilier soit concerné par l'action ou que l'action ait un lien avec un immeuble pour que l' article 16, paragraphe 1, s'applique. Il faut que l'action soit fondée sur un droit réel et non, sauf l'exception prévue pour les baux d'immeubles, sur un droit personnel."
Motif 15 : "L'action dont est saisie en l'espèce la juridiction de renvoi tend à faire reconnaître que Webb fils détient l'appartement au bénéfice exclusif de son père et que, en cette qualité, il a le devoir de préparer les documents nécessaires à lui en transférer la propriété. Le père ne prétend pas être d'ores et déjà titulaire de prérogatives qui porteraient directement sur l'immeuble et qui seraient opposables à tous, mais invoque uniquement des droits à l'encontre de son fils. Dès lors, son action n'est pas une action réelle au sens de l'article 16, paragraphe 1, de la convention, mais est une action personnelle".
Dispositif (et motif 19) : "L'action tendant à faire constater qu'une personne détient un bien immobilier en qualité de trustee et à lui faire enjoindre d'établir les documents nécessaires pour que le demandeur devienne titulaire du legal ownership n'est pas une action réelle au sens de l'article 16, paragraphe 1, de la convention du 27 septembre 1968 (...)".
Europe 1994, n° 297, obs. L. Idot
JDI 1995. 477, note J.-M. Bischoff
Rev. crit. DIP 1995. 123, note J.-P. Béraudo
Aff. C-115/88, Concl. J. Mischo
Motif 8 : "ll apparaît, tout d'abord, que, en vue d'assurer, dans la mesure du possible, l'égalité et l'uniformité des droits et obligations qui découlent de la convention pour les États contractants et les personnes intéressées, il convient de déterminer de manière autonome, en droit communautaire, le sens de l'expression "en matière de droits réels immobiliers".
Motif 9 : "Il convient, ensuite, de relever qu'ainsi que la Cour l'a déjà jugé l'article 16 ne doit pas être interprété dans un sens plus étendu que ne le requiert son objectif dès lors qu'il a pour effet de priver les parties du choix du for qui autrement serait le leur et, dans certains cas, de les attraire devant une juridiction qui n'est la juridiction propre du domicile d'aucune d'entre elles".
Motif 10 : "De ce point de vue, il faut prendre en considération le fait que le motif essentiel de la compétence exclusive des tribunaux de l'État contractant où l'immeuble est situé est la circonstance que le tribunal du lieu de situation est le mieux à même, compte tenu de la proximité, d'avoir une bonne connaissance des situations de fait et d'appliquer les règles et usages qui sont, en général, ceux de l'État de situation".
Motif 11 : "Dans ces conditions, l'article 16, paragraphe 1, doit s'interpréter en ce sens que la compétence exclusive des tribunaux de l'État contractant où l'immeuble est situé n'englobe pas l'ensemble des actions qui concernent des droits réels immobiliers, mais seulement celles d'entre elles qui, tout à la fois, entrent dans le champ d'application de la convention de Bruxelles et sont au nombre de celles qui tendent à déterminer l'étendue, la consistance, la propriété, la possession d'un bien immobilier ou l'existence d'autres droits réels sur ces biens et à assurer aux titulaires de ces droits la protection des prérogatives qui sont attachées à leur titre".
Motif 12 : "Or, l'action dite "paulienne" trouve son fondement dans le droit de créance, droit personnel du créancier vis-à-vis de son débiteur, et a pour objet de protéger le droit de gage dont peut disposer le premier sur le patrimoine du second . Si elle aboutit, sa conséquence est de rendre inopposable au seul créancier l'acte de disposition passé par le débiteur en fraude de ses droits. De plus, son examen n'exige pas l'appréciation de faits ni l'application des règles et usages du lieu de situation du bien qui sont de nature à justifier la compétence d'un juge de l'État dans lequel l'immeuble est situé".
Dispositif (et motif 15) : "Ne relève pas du champ d'application de l'article 16, paragraphe 1, de la convention l'action qui, intentée par un créancier, tend à lui rendre inopposable un acte de disposition portant sur un droit réel immobilier qu'il soutient avoir été passé par son débiteur en fraude de ses droits".
JDI 1990. 503, obs. J.-M. Bischoff
Rev. crit. DIP 1991. 151, note B. Ancel
Motifs : "Mais attendu qu'après avoir énoncé que les points 1 et 2 de l'article 22 de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007 (...), disposent qu'en matière de droits réels immobiliers, sont seuls compétents les tribunaux de l'Etat où l'immeuble est situé, et qu'en matière de validité, de nullité ou de dissolution des sociétés ou personnes morales, cette compétence appartient seulement aux juridictions de l'Etat de leur siège social, l'arrêt retient qu'une action visant à déterminer le propriétaire d'un immeuble situé en France est une action réelle immobilière au sens de la Convention, qui relève des juridictions françaises, auxquelles il incombe d'examiner les moyens de défense relevant ou non de la compétence exclusive d'autres juridictions ; que de ces énonciations et appréciations, la cour d'appel, qui a effectué la recherche prétendument omise, a exactement déduit que la juridiction française était compétente pour se prononcer sur la qualité de propriétaire de la société suisse, ce qui n'impliquait pas nécessairement l'appréciation de la fictivité de celle-ci ; que le moyen ne peut être accueilli ; (...)".
Motifs : "Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties dans les conditions de l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu les articles 22, 1°, et 25 du règlement (CE) du Conseil n° 44/2001 (…), applicable en la cause ;
Attendu, selon le premier de ces textes, qu'en matière de droits réels immobiliers, sont seuls compétents, sans considération du domicile des parties, les tribunaux de l'Etat membre où l'immeuble est situé ; que, selon le second, le juge d'un Etat membre, saisi à titre principal d'un litige pour lequel une juridiction d'un autre Etat membre est exclusivement compétent, se déclare d'office incompétent ;
Attendu que l'arrêt attaqué statue sur la liquidation de l'indivision existant entre Mme X...et M. Y..., qui ont vécu en concubinage, et dit notamment qu'ils sont propriétaires indivis, en vertu d'un acte authentique espagnol, d'un bien immobilier situé à Benidorm (Espagne) ;
Attendu, cependant, que la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit (CJUE, arrêt du 17 décembre 2015, C-605/14) que l'article 22, point 1, premier alinéa, du règlement (CE) n° 44/ 2001 du Conseil du 22 décembre 2000 doit être interprété en ce sens que relève de la catégorie des litiges "en matière de droits réels immobiliers", au sens de cette disposition, une action en dissolution, au moyen d'une vente dont la mise en oeuvre est confiée à un mandataire, de la copropriété indivise sur un bien immeuble ;
Attendu qu'il s'en déduit que le juge espagnol est seul compétent pour connaître d'un litige relatif à la propriété et au partage, entre des résidents français, d'une indivision portant sur un immeuble situé en Espagne, de sorte que le juge français doit relever d'office son incompétence".
JCP N 2017, 1315, note S. Drapier
Motifs : "Mme Liselotte X... a assigné devant le juge français Mme Sandra X..., Mme Lilian X... et Mme Christiane Y..., en tant qu'ayants droit de Walter X..., en réparation du préjudice résultant de la violation de l'engagement contractée à son égard par leur auteur de lui remettre les droits qui avaient été restitués à ce dernier sur un immeuble situé à Prague (République tchèque) à la suite d'une action en revendication qu'elle ne pouvait elle-même intenter pour avoir perdu la nationalité tchèque; (...)
1°/ que toute action ayant pour objet une obligation de transférer la propriété d'un immeuble est une action « en matière de droits réels immobiliers » au sens de l'article 22§1 du Règlement 44/ 2001(...)
2°/ qu'en tout état de cause, qu'en formulant sa demande dans le seul but de contourner la compétence exclusive des juridictions tchèques, Mme Z... a commis une fraude qui était de nature à écarter la compétence de la juridiction française saisie; (...)
Mais attendu, d'abord, qu'après avoir relevé que les consorts Y...- X... avaient été assignés en indemnisation de préjudice pour violation de l'obligation de restituer l'intégralité d'un immeuble et refus d'accepter l'offre de vente émanant de la ville de Prague, la cour d'appel en a justement déduit qu'il s'agissait d'une action personnelle et non d'une action réelle immobilière ;
Attendu, ensuite, qu'après avoir relevé que les consorts Y...- X... n'avaient fait aucune référence à la loi tchèque, la cour d'appel a, par une décision motivée, souverainement estimé que le moyen tiré d'une prétendue fraude à la loi, motif pris d'une modification artificieuse de la qualification de l'action afin d'échapper à la compétence des juridictions tchèques était inopérant".
Motif : "(...) attendu, sur le second point, que c'est encore à juste titre que la cour d'appel a considéré que l'action dont l'objet est de contraindre à une obligation de faire et d'obtenir l'indemnisation d'un préjudice moral ne met en cause aucun droit réel immobilier au sens de l'article 16.1, de la Convention (...)".
Rev. crit. DIP 1997. 97, note H. Gaudemet-Tallon
D. 1998. Somm 283, obs. B. Audit
JDI 1997. 1016, obs. A. Huet
Motif : "Attendu (...) que les contrats, objet du litige, ont été souscrits en Espagne [et qu'ils ont] pour but de transférer à l'acquéreur une ou plusieurs participations dans une société civile propriétaire de biens immeubles à MIRAFLORES (MALAGA-Espagne) donnant droit chacune à l'utilisation d'une semaine de vacances annuelle dans un de ces immeubles; (...) que l'article VI du contrat (...) précise que les droits acquis par le présent contrat appartiennent, conformément à la loi, à la catégorie des droits réels".
Motif : "Qu'ainsi, la compétence des tribunaux français est, en tout état de cause, exclue ; Que la connaissance du présent litige relève de la compétence des autorités judiciaires espagnoles".
JDI 2004. 207, note. A. Huet
[Sont seuls compétents, sans considération de domicile:]
1) en matière de droits réels immobiliers et de baux d'immeubles, les tribunaux de l'État membre où l'immeuble est situé.
Toutefois, en matière de baux d'immeubles conclus en vue d'un usage personnel temporaire pour une période maximale de six mois consécutifs, sont également compétents les tribunaux de l'État membre dans lequel le défendeur est domicilié, à condition que le locataire soit une personne physique et que le propriétaire et le locataire soient domiciliés dans le même État membre;
Aff. C-73/04, Concl. L. A. Geelhoed
Motif 26 : "Il apparaît que le lien entre le contrat d’adhésion au club en cause au principal, d’une part, et le bien immobilier susceptible d’être effectivement utilisé par l’adhérent, d’autre part, n’est pas suffisamment étroit pour justifier la qualification de contrat de bail au sens de l’article 16, point 1, sous a), de la convention (...)".
Motif 27 : "Cette conclusion est corroborée par le fait que ledit contrat d’adhésion prévoit la fourniture de prestations de services qui sont mises à la disposition des adhérents au club dans les mêmes conditions que celles offertes aux clients du complexe hôtelier. Comme l’a fait valoir la Commission, ces prestations supplémentaires vont au-delà de la cession d’un droit d’usage qui constitue l’objet d’un contrat de bail. Si le contenu et la nature des prestations en cause au principal ne sont pas précisés dans la décision de renvoi, il convient néanmoins de rappeler qu’un contrat complexe portant sur un ensemble de prestations de services fournies contre un prix global payé par le client se situe en dehors du domaine dans lequel le principe de la compétence exclusive prévue à l’article 16, point 1, de la convention trouve sa raison d’être, et ne saurait constituer un contrat de bail proprement dit au sens de cet article (arrêt du 26 février 1992, Hacker, C-280/90, Rec. p. I‑1111, point 15)".
Dispositif (et motif 28) : "L’article 16, point 1, sous a), de la convention du 27 septembre 1968 (...) doit être interprété en ce sens qu’il ne s’applique pas à un contrat d’adhésion à un club qui, en contrepartie d’un droit d’adhésion représentant l’élément dominant du prix global, permet aux adhérents d’acquérir un droit d’utilisation à temps partiel sur un bien immobilier uniquement désigné par son type et sa situation et prévoit l’affiliation des adhérents à une organisation permettant un échange de leur droit d’utilisation".
Rev. crit. DIP 2006. 183, note H. Muir Watt
Europe 2005, nº 421, obs. L. Idot
RJ com. 2005. 501, obs. A. Raynouard
Aff. C-8/98, Concl. A. La Pergola
Motif 23 : "S'agissant d'une affaire telle que celle au principal qui est relative non pas à un droit réel immobilier, mais à un bail d'immeuble, relève de [l'art. 16, point 1, de la convention] tout litige qui concerne les droits et obligations découlant d'un contrat de location d'un bien immobilier, peu importe que l'action soit fondée sur un droit réel ou sur un droit personnel".
Motif 36 : "l'article 16, point 1, sous a), de la convention n'est pas rendu inapplicable du seul fait qu'en l'occurrence le litige n'oppose pas directement le propriétaire et le locataire de l'immeuble, étant donné que Dansommer a intenté une action en justice à l'encontre du locataire en tant que subrogée dans les droits du propriétaire du bien immobilier ayant fait l'objet du contrat de bail conclu entre Dansommer et M. Götz".
Dispositif (et motif 38) : "La règle de compétence exclusive prévue en matière de baux d'immeubles par l'article 16, point 1, sous a), de la convention du 27 septembre 1968 (...) est applicable à une action en dommages-intérêts pour mauvais entretien des lieux et dégâts causés à un logement qu'un particulier avait loué pour y passer quelques semaines de vacances, même lorsqu'elle n'est pas intentée directement par le propriétaire de l'immeuble, mais par un organisateur professionnel de voyages auprès duquel l'intéressé avait loué le logement et qui agit en justice à la suite d'une subrogation dans les droits du propriétaire de l'immeuble".
Les clauses accessoires relatives à l'assurance en cas de résiliation et à la garantie du prix payé par le client, qui figurent aux conditions générales du contrat conclu entre cet organisateur et le locataire et qui ne font pas l'objet du litige au principal, n'affectent pas la nature du bail d'immeuble au sens de cette disposition de la convention".
Rev. crit. DIP 2000. 264, note H. Muir Watt
Defrénois 2000. 1103, note R. Crône
JCP 2000 II 10432, note C. Bruneau
D. 2000 Jur. 417, note F. Boulanger
Europe 2000, n° 84, obs. L. Idot
JDI 2000. 550, obs. A. Huet
RJDA 2001. 483, obs. X
Aff. C-292/93, Concl. M. Darmon
Motif 13 : "(...) il ne suffit pas qu'un droit réel immobilier soit concerné par l'action ou que l'action ait un lien avec un immeuble pour que l'article 16, paragraphe 1, s'applique. Il faut que l'action soit fondée sur un droit réel et non, sauf l'exception prévue pour les baux d'immeubles, sur un droit personnel".
Motif 15 : "Or, il est évident qu'une demande d'indemnisation pour la jouissance d'un immeuble ne peut être invoquée qu'à l'encontre du débiteur et qu'elle constitue, dès lors, un droit personnel, du moins lorsque ce débiteur ne conteste pas que le demandeur soit le propriétaire de l'immeuble en cause".
Motif 20 : "Le simple fait que, dans un cas tel que celui de l'espèce, l'indemnité due est à calculer selon des principes régissant le droit des baux ne justifie pas l'application de l'article 16, paragraphe 1, à une situation ne faisant intervenir aucun bail. En effet, le rapport propriétaire-locataire comporte une série de droits et d'obligations, outre celle afférente au loyer. Ce rapport est régi par des législations particulières, dont certaines de caractère impératif, de l'État où l'immeuble qui fait l'objet du bail est situé, telles que, par exemple, celles qui déterminent à qui incombe la responsabilité de l'entretien de l'immeuble et du paiement des impôts fonciers, celles qui régissent les devoirs de l'occupant de l'immeuble vis-à-vis des voisins, ainsi que celles qui contrôlent ou limitent le droit du propriétaire de reprendre possession de l'immeuble au terme du bail. C'est la complexité de ce rapport, ainsi que l'intérêt de l'État où l'immeuble est situé de veiller au respect de ces dispositions, qui justifie la compétence exclusive attribuée à cet État en matière de baux. Or, ces raisons ne s'appliquent pas en l'absence du rapport propriétaire-locataire".
Dispositif (et motif 22) : "Une demande d'indemnisation pour la jouissance d'une habitation après l'annulation d'un transfert de propriété ne relève pas des matières régies par l'article 16, paragraphe 1, de la convention du 27 septembre 1968 (...)".
Rev. crit. DIP 1995. 126, note J.-P. Béraudo
JDI 1995.477, note J.-M. Bischoff
RJDA 1994. 958, obs. X
Aff. C-280/90, Concl. M. Darmon
Motif 14 : "(...) indépendamment de son intitulé et bien qu'il prévoie une prestation portant sur l'usage d'un logement de vacances pour une courte durée, un tel contrat [du type de celui qui est en cause] comporte également d'autres prestations, tels les informations et conseils par lesquels l'organisateur de voyages propose au client un éventail de choix pour les vacances, la réservation d'un logement pour la période choisie par le client, la réservation de places pour le transport, l'accueil sur place et, éventuellement, une assurance pour annulation du voyage".
Motif 15 : "Un tel contrat complexe portant sur un ensemble de prestations de services fournies contre un prix global payé par le client se situe en dehors du domaine dans lequel le principe de la compétence exclusive prévue par l' article 16, paragraphe 1, trouve sa raison d' être, et ne saurait constituer un contrat de bail proprement dit au sens de cet article".
Dispositif (et motif 16) : "L'article 16, paragraphe 1, de la convention de Bruxelles doit être interprété en ce sens qu'il ne s'applique pas à un contrat conclu dans un État contractant par lequel un organisateur professionnel de voyages, ayant son siège social dans cet État, s'engage vis-à-vis d'un client, domicilié dans le même État, à procurer à ce dernier, pour quelques semaines, l'usage d'un logement de vacances situé dans un autre État contractant, qui n'est pas la propriété de l'organisateur de voyages, ainsi qu'à assurer la réservation du voyage".
JDI 1992. 505, obs. A. Huet
Rev. crit. DIP 1993. 78, note G. A. L. Droz
D. 1992. Jur. 454, obs. O. Filali
Aff. 158/87, Concl. G. F. Mancini
Motif 13 : "II y a lieu d'interpréter l'article 16, initio et point 1, en ce sens que, dans un litige dont l'objet est de déterminer l'existence éventuelle d'un contrat de bail relatif à une propriété immobilière située dans deux États contractants, sont, en principe, exclusivement compétents à l'égard des biens immobiliers situés sur le territoire de chaque État contractant les tribunaux de cet État".
Motif 14 : "II n'est toutefois pas exclu que puissent se présenter des cas où une propriété immobilière dont les éléments sont situés dans deux États contractants, mais font l'objet d'un seul contrat de bail présente des particularités telles qu'une exception à la règle générale de compétences exclusives décrite ci-dessus s'impose. Il pourrait en être ainsi, par exemple, lorsque les biens immobiliers situés dans un État contractant sont contigus avec les biens dans l'autre État et que la propriété est presque entièrement située dans l'un de ces États. Dans de telles circonstances, il peut être approprié de regarder la propriété comme une unité et de la considérer comme étant entièrement située dans un de ces États aux fins de l'attribution aux tribunaux de celui-ci d'une compétence exclusive à l'égard du bail d'immeuble".
Dispositif (et motif 16) : "L'article 16, initio et point 1, de la convention du 27 septembre 1968 (...) doit être interprété en ce sens que, dans un litige dont l'objet est de déterminer l'existence éventuelle d'un contrat de bail relatif à une propriété immobilière située dans deux États contractants, sont exclusivement compétents à l'égard des biens immobiliers situés sur le territoire de chaque État contractant les tribunaux de cet État".
JDI 1989. 454, obs. A. Huet
Rev. crit. DIP 1989. 545, note H. Gaudemet-Tallon
Gaz. Pal. 1988 II Som. 423, obs. J. Mauro
Aff. 241/83, Concl. G. Slynn
Motif 19 : "La compétence exclusive prévue par l'article 16, paragraphe 1, en faveur des tribunaux de l'État contractant où l'immeuble est situé a sa raison d'être dans le rattachement étroit des baux au régime juridique de la propriété immobilière et aux dispositions, de caractère généralement impératif, qui règlent son usage, telles que les législations relatives au contrôle du niveau des loyers et à la protection des droits des locataires et fermiers".
Motif 20 : "Au surplus, l'article 16, paragraphe 1, vise à assurer une répartition rationnelle des compétences, en donnant sa préférence à la juridiction compétente en raison de sa proximité de la situation de l'immeuble, en ce qu'elle est mieux en mesure d'avoir une connaissance directe des situations de fait liées à la conclusion et à l'exécution des baux immobiliers".
Motif 24 : "II s'ensuit que la disposition en question s'applique à tout contrat de location de propriété immobilière, quelles que soient ses caractéristiques particulières".
Motif 25 : "II y a donc lieu de répondre à la première question que l'article 16, paragraphe 1, de la convention est applicable à tout contrat de location d'un immeuble, même pour une durée limitée, et même s'il ne porte que sur une cession d'usage d'une maison de vacances".
Dispositif 1 (et motif 25) : "L'article 16, paragraphe 1, de la convention est applicable à tout contrat de location d'un immeuble, même pour une durée limitée, et même s'il ne porte que sur une cession d'usage d'une maison de vacances".
Dispositif 2 (et motif 29) : "Relèvent de la compétence exclusive des tribunaux de l'État où est situé l'immeuble, prévue par l'article 16, paragraphe 1, de la convention, tous les litiges concernant les obligations respectives du bailleur et du locataire découlant du contrat de bail, et en particulier ceux qui portent sur l'existence ou l'interprétation de baux, leur durée, la restitution de la possession de l'immeuble au bailleur, la réparation de dégâts causés par le locataire, ou le recouvrement du loyer et des autres frais accessoires à payer par le locataire, tels les frais de consommation d'eau, de gaz et d'électricité. En revanche, des litiges qui ne se rapportent qu'indirectement à l'usage de la propriété louée, tels ceux concernant la perte du bénéfice des vacances et les frais de voyage, ne relèvent pas de la compétence exclusive visée par cet article".
Rev. crit. 1986. 128, note G. A. L. Droz
Gaz. Pal. 1985 II Som.156, note J. Mauro
Rev. Marché commun 1987. 101, obs. L. Focsaneanu
Aff. 73/77, Concl. H. Mayras
Motif 14 : "Que les baux immobiliers sont généralement régis par des règles particulières, et qu'il est préférable que l'application de ces dispositions ne relève, notamment en raison de leur complexité, que des juges du pays où elles sont en vigueur".
Motif 15 : "Que ces considérations expliquent l'attribution en matière de baux d'immeubles proprement dits, c'est-à-dire notamment de contestations entre bailleurs et locataires relatives à l'existence ou à l'interprétation de baux ou à la réparation de dégats causés par le locataire et à l'évacuation des locaux, d'une compétence exclusive aux tribunaux du pays où l'immeuble est situé".
Motif 16 : "Que les mêmes considérations ne s'appliquent pas lorsque l'objet principal du contrat est d'une nature différente, notamment lorsqu'il concerne l'exploitation d'un fonds de commerce".
Motif 17 : "Qu'en outre, l'attribution, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, d'une compétence exclusive aux tribunaux d'un État contractant dans le cadre de l'article 16 de la convention, a pour effet de priver les parties du choix du for qui autrement serait le leur, et, dans certains cas, à les attraire devant une juridiction qui n'est la juridiction propre du domicile d'aucune d'entre elles".
Motif 18 : "Que cette considération conduit à ne pas interpréter les dispositions de l'article 16 dans un sens plus étendu que ne requiert leur objectif".
Dispositif (et motif 19) : "La notion de "matière ... de baux d'immeubles" dans le cadre de l'article 16 de la convention ne doit pas être interprétée comme incluant le cas d'un contrat relatif à l'exploitation d'un commerce (verpachting van een winkelbedrijf) exercé dans un immeuble pris en location par le bailleur d'un tiers".
JDI 1978. 388, obs. J.-M. Bischoff
RTD com. 1978. 657, obs. Y. Loussouarn, P. Bourel
Motif : "(…) le tribunal [français] du lieu où était situé l'immeuble était seul compétent [pour connaître de l'action en annulation du bail] à l'exclusion de toute autre juridiction, de sorte que la juridiction belge [saisie en premier lieu d'une action en résiliation dudit bail] ne pouvait connaître du litige".
JCP 2006.II.10043, note D. Martel
[Sont seuls compétents, sans considération de domicile:]
2) en matière de validité, de nullité ou de dissolution des sociétés ou personnes morales ayant leur siège sur le territoire d'un État membre, ou de validité des décisions de leurs organes, les tribunaux de cet État membre. Pour déterminer le siège, le juge applique les règles de son droit international privé;
Aff. C-560/16, Concl. M. Wathelet
Motif 34 : "(…) s’il est vrai que, en vertu du droit tchèque, une procédure telle que celle en cause au principal ne peut aboutir formellement à une décision ayant pour effet d’invalider une résolution de l’assemblée générale d’une société portant sur le transfert obligatoire des titres des actionnaires minoritaires de cette société à l’actionnaire majoritaire de celle-ci, il n’en reste pas moins que, conformément aux exigences d’interprétation autonome et d’application uniforme des dispositions du règlement n° 44/2001, la portée de l’article 22, point 2, de celui-ci ne saurait dépendre des choix opérés dans le droit interne des États membres ou varier en fonction de ceux-ci".
Motif 35 : "Or, d’une part, cette procédure trouve son origine dans la contestation du montant de la contrepartie relative à un tel transfert, et, d’autre part, a pour objet le contrôle du caractère raisonnable de ce montant".
Motif 36 : "Il s’ensuit que, au regard de l’article 22, point 2, du règlement n° 44/2001, une procédure judiciaire telle que celle en cause au principal porte sur le contrôle de la validité partielle d’une décision d’un organe d’une société et qu’une telle procédure est, de ce fait, susceptible de relever du champ d’application de cette disposition, tel qu’il est envisagé par le libellé de cette dernière".
Dispositif : "L’article 22, point 2, du règlement (CE) n° 44/2001 (…) doit être interprété en ce sens qu’un recours, tel que celui en cause au principal, ayant pour objet le contrôle du caractère raisonnable de la contrepartie que l’actionnaire principal d’une société est tenu de verser aux actionnaires minoritaires de celle-ci en cas de transfert obligatoire de leurs actions à cet actionnaire principal, relève de la compétence exclusive des tribunaux de l’État membre sur le territoire duquel cette société est établie".
Aff. C-560/16, Concl. M. Wathelet
Parties requérantes: Michael Dědouch, Petr Streitberg, Pavel Suda
Parties défenderesses: Jihočeská plynárenská, a.s. et E.ON Czech Holding AG
1) L’article 22, paragraphe 2 du règlement (CE) n° 44/2001 (…) doit-il être interprété en ce sens qu’il s’applique également à la procédure de contrôle du caractère raisonnable de la contrepartie, que l’actionnaire principal est tenu de verser, en tant que contre-valeur des titres à caractère participatif, aux détenteurs antérieurs desdits titres, qui lui ont été transférés en conséquence d’une résolution adoptée par l’assemblée générale d’une société anonyme, relative au transfert obligatoire des autres titres à caractère participatif à l’actionnaire principal (procédure dite d’«éviction»), lorsque la résolution ainsi adoptée fixe le montant de la contrepartie raisonnable et qu’il existe une décision de justice conférant le droit à un montant de contrepartie différent, contraignante pour l’actionnaire principal et la société, s’agissant de la base du droit conféré, ainsi qu’à l’égard des autres détenteurs de titres à caractère participatif ?
2) En cas de réponse négative à la première question, l’article 5, paragraphe 1er, sous a) du règlement Bruxelles I doit-il être interprété en ce sens qu’il couvre également la procédure de contrôle du caractère raisonnable de la contrepartie décrite dans la première question ?
3) En cas de réponse négative aux deux questions qui précèdent, l’article 5, paragraphe 3 du règlement Bruxelles I doit-il être interprété en ce sens qu’il couvre également la procédure de contrôle du caractère raisonnable de la contrepartie décrite dans la première question ?
Conclusions de l'AG M. Wathelet :
"L’article 22, point 2, du règlement (CE) n° 44/2001 (…) doit être interprété en ce sens qu’il s’applique à une procédure de contrôle du caractère raisonnable de la contrepartie que l’actionnaire principal est tenue de verser aux détenteurs antérieurs de titres à caractère participatif (actionnaires minoritaires), à titre de contre-valeur de ces titres, qui lui ont été transférés en conséquence d’une résolution adoptée par l’assemblée générale d’une société anonyme et imposant le transfert des autres titres à caractère participatif à l’actionnaire principal".
Aff. C-302/13, Concl. J. Kokott
Motif 40 : "En ce qui concerne l’article 22, point 2, du règlement n° 44/2001, la Cour a déjà eu l’occasion de dire pour droit que cette disposition doit être interprétée en ce sens que son champ d’application ne vise que les litiges dans lesquels une partie conteste la validité d’une décision d’un organe d’une société au regard du droit des sociétés applicable ou des dispositions statutaires concernant le fonctionnement de ses organes (arrêt Hassett et Doherty, C‑372/07, EU:C:2008:534, point 26)".
Motif 41 : "(...) l’objet, au fond, du litige au principal concerne une demande de réparation du préjudice résultant de violations alléguées du droit de la concurrence de l’Union, et non pas la validité, la nullité ou la dissolution des sociétés ou des personnes morales, ou la validité des décisions de leurs organes, au sens de l’article 22, point 2, dudit règlement".
Dispositif 2) (et motif 42) : "Il convient donc de répondre (...) que l’article 22, point 2, du règlement n° 44/2001 doit être interprété en ce sens qu’une action, telle que celle en cause au principal, visant à obtenir la réparation du préjudice résultant de violations alléguées du droit de la concurrence de l’Union, ne constitue pas une procédure ayant pour objet la validité des décisions des organes de sociétés au sens de cette disposition".
Motif 38 : "Dans le contexte d’un litige de nature contractuelle, des questions tenant à la validité, à l’interprétation ou à l’opposabilité du contrat sont au cœur de celui-ci et en constituent l’objet. Toute question concernant la validité de la décision de conclure ledit contrat, prise antérieurement par les organes sociaux de l’une des parties, doit être considérée comme accessoire. Si elle peut faire partie de l’analyse devant être effectuée à cet égard, elle n’en constitue néanmoins pas le seul, ni même le principal objet".
Motif 39 : "Ainsi, l’objet d’un tel litige contractuel ne présente pas nécessairement un lien particulièrement étroit avec le for du siège de la partie qui invoque une prétendue invalidité d’une décision de ses propres organes. Il serait donc contraire à une bonne administration de la justice de soumettre de tels litiges à la compétence exclusive des juridictions de l’État membre du siège de l’une des sociétés contractantes".
Motif 44 : "Il convient de résoudre la divergence entre les versions linguistiques de l’article 22, point 2, du règlement n° 44/2001 (...) en interprétant cette disposition en ce sens qu’elle vise uniquement les litiges dont l’objet principal est constitué par la validité, la nullité ou la dissolution des sociétés ou personnes morales ou par la validité des décisions de leurs organes".
Dispositif (et motif 47) : "L’article 22, point 2, du règlement (CE) n° 44/2001 (...) doit être interprété en ce sens qu’il ne s’applique pas à un litige dans le cadre duquel une société se prévaut de l’inopposabilité d’un contrat à son égard, en raison de la prétendue invalidité, pour cause de violation de ses statuts, d’une décision de ses organes ayant conduit à la conclusion de celui-ci".
Rev. crit. DIP 2011. 922, note E. Treppoz
Europe 2011, n° 276, obs. L. Idot
RJ com. 2012. 32, obs. M.-E. Ancel
D. 2011. 2436, obs. S. Bollée
RTD eur. 2011. 477, obs. E. Guinchard
RTD com. 2011. 814, obs. A. Marmisse-d'Abbadie d'Arrast
Procédures 2011, n° 228, obs. C. Nourissat
Motif 22 : "Il ne saurait (...) être déduit (...) qu’il suffit, afin que l’article 22, point 2, du règlement n° 44/2001 s’applique, qu’une action judiciaire présente un quelconque lien avec une décision adoptée par un organe d’une société".
Motif 23 : "En effet, (...) si tous les litiges portant sur une décision d’un organe d’une société devaient relever de l’article 22, point 2, du règlement n° 44/2001, cela signifierait en réalité que les actions juridictionnelles, qu’elles soient de nature contractuelle, délictuelle ou autre, engagées contre une société relèveraient presque toujours de la compétence des juridictions de l’État membre du siège de cette société".
Motif 24 : "Or, une telle interprétation dudit article aboutirait à soumettre à la compétence dérogatoire en cause à la fois des litiges qui ne seraient pas susceptibles de donner lieu à des décisions contradictoires sur la validité des délibérations des organes d’une société, dans la mesure où leur solution n’aurait aucune incidence sur cette validité, ainsi que des litiges qui n’exigent aucunement l’examen des formalités de publicité applicables à une société".
Motif 26 : "Il s’ensuit que (...) ledit article doit être interprété en ce sens que son champ d’application ne vise que les litiges dans lesquels une partie conteste la validité d’une décision d’un organe d’une société au regard du droit des sociétés applicable ou des dispositions statutaires concernant le fonctionnement de ses organes".
Dispositif (et motif 31) : "L’article 22, point 2, du règlement (CE) n° 44/2001 (...) doit être interprété en ce sens que ne concerne pas la validité des décisions des organes d’une société, au sens de cette disposition, une action, telle celle en cause au principal, dans le cadre de laquelle une partie allègue qu’une décision adoptée par un organe d’une société a violé les droits que ladite partie prétend tirer des statuts de cette société".
Rev. crit. DIP 2009. 71, note B. Ancel
Europe 2008, comm. 432, obs. L. Idot
JCP 2009. I. 107, n° 14, obs. A. Marmisse-d'Abbadie d'Arrast
Procédures 2008, comm. 330, obs. C. Nourissat
RTD com. 2008. 896, obs. A. Marmisse-d'Abbadie d'Arrast
Motifs : "Mais attendu qu'après avoir énoncé que les points 1 et 2 de l'article 22 de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007 (...), disposent qu'en matière de droits réels immobiliers, sont seuls compétents les tribunaux de l'Etat où l'immeuble est situé, et qu'en matière de validité, de nullité ou de dissolution des sociétés ou personnes morales, cette compétence appartient seulement aux juridictions de l'Etat de leur siège social, l'arrêt retient qu'une action visant à déterminer le propriétaire d'un immeuble situé en France est une action réelle immobilière au sens de la Convention, qui relève des juridictions françaises, auxquelles il incombe d'examiner les moyens de défense relevant ou non de la compétence exclusive d'autres juridictions ; que de ces énonciations et appréciations, la cour d'appel, qui a effectué la recherche prétendument omise, a exactement déduit que la juridiction française était compétente pour se prononcer sur la qualité de propriétaire de la société suisse, ce qui n'impliquait pas nécessairement l'appréciation de la fictivité de celle-ci ; que le moyen ne peut être accueilli ; (...)".
Pourvoi n° 16-12853
Motifs : "Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société roumaine Euroinvest intermed a confié la gestion d'un centre commercial, situé à Bucarest, à la société CEGIS imobiliare, filiale locale de la société Compagnie européenne de gestion immobilière et services (CEGIS France) ; qu'elle a assigné cette dernière en paiement de diverses condamnations prononcées par les juridictions de Roumanie à l'encontre de la société CEGIS imobiliare ; que la société C. Basse, mandataire judiciaire de la société CEGIS France, a été assignée en intervention forcée ;
Attendu que, pour dire le juge français incompétent, l'arrêt retient que seul un tribunal roumain peut se prononcer sur la fictivité de la société CEGIS imobiliare ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'action de la société Euroinvest intermed n'avait pas pour objet principal de prononcer la fictivité de cette société mais tendait au paiement de sommes dues au titre de la gestion fautive d'un centre commercial, la cour d'appel a violé [l'article 22 al. 2 du règlement n° 44/2001]".
Motifs : "Mais attendu que (…) la validité de la délibération alléguée, prise le 3 octobre 2000 [par le conseil d'administration d'une société française, relative à un acte de cession d'actions au profit de cessionnaires demeurant en Suisse], n'était pas l'objet du litige [qui concernait les engagements pris par les cessionnaires envers le cédant, demandeur à l'action] (…), la cour d'appel a exactement retenu que l'article 16-2 de la Convention de Lugano du 16 septembre 1988 n'était pas applicable".
Rev. sociétés 2013. 637, obs. M. Menjucq
BJS 2013 p. 742, note B. Dondero
Motif : "Vu les articles 4 et 22-2 du règlement CE n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;
Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, si le défendeur n'est pas domicilié sur le territoire d'un Etat membre, la compétence est, dans chaque Etat membre, réglée par la loi de cet Etat membre, sous réserve de l'application des articles 22 et 23 ; qu'aux termes du second, sont seuls compétents, sans considération de domicile, en matière de validité des décisions des organes des sociétés ayant leur siège sur le territoire d'un Etat membre de l'Union européenne, les tribunaux de cet Etat membre ;
Attendu que pour accueillir le contredit [qu'elle a formée], l’arrêt retient que la société Qualigram software n’étant pas domiciliée dans un Etat membre de l’Union européenne [mais au Canada], les dispositions du règlement CE n° 44/2001 ne lui sont pas applicables ; qu’il en déduit que la règle de principe prévue à l’article 42 du code de procédure civile, qui donne compétence au tribunal où demeure le défendeur, transposée en matière internationale, doit recevoir application ;
Attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés".
D. 2011. Pan. 2434, obs. L. d’Avout, S. Bollée
BJS 2011. 917, note M. Menjucq
Rev. sociétés 2011. 714, note Th. Mastrullo
JCP E 2011, n° 1529, note J.-P. Legros
[Sont seuls compétents, sans considération de domicile:]
3) en matière de validité des inscriptions sur les registres publics, les tribunaux de l'État membre sur le territoire duquel ces registres sont tenus;
[Sont seuls compétents, sans considération de domicile:]
4) en matière d'inscription ou de validité des brevets, marques, dessins et modèles, et autres droits analogues donnant lieu à dépôt ou à un enregistrement, les juridictions de l'État membre sur le territoire duquel le dépôt ou l'enregistrement a été demandé, a été effectué ou est réputé avoir été effectué aux termes d'un instrument communautaire ou d'une convention internationale.
Sans préjudice de la compétence de l'Office européen des brevets selon la convention sur la délivrance des brevets européens, signée à Munich le 5 octobre 1973, les juridictions de chaque État membre sont seules compétentes, sans considération de domicile, en matière d'inscription ou de validité d'un brevet européen délivré pour cet État;
Aff. C-341/16, Concl. H. Saugmandsgaard Øe
Dispositif : "L’article 22, point 4, du règlement (CE) n° 44/2001 (…) doit être interprété en ce sens qu’il ne s’applique pas aux litiges visant à déterminer si une personne a été inscrite à juste titre en tant que titulaire d’une marque".
Aff. C-230/15, Concl. H. Saugmandsgaard Øe
Motif 63 : "Eu égard au fait que les marques, dessins et modèles Benelux relèvent d’un régime avancé dans les trois États membres concernés, à la structure juridictionnelle établie par le Benelux, fondée sur un système décentralisé assorti d’un mécanisme de renvois préjudiciels à la Cour de justice Benelux, et au caractère multilingue de cette union régionale, la règle codifiée à l’article 4.6 de la CBPI, qui est notamment fondée sur le domicile du défendeur et assure ainsi que les litiges relatifs aux marques, dessins et modèles Benelux puissent être traités, selon le cas, par une juridiction belge, luxembourgeoise ou néerlandaise, au lieu d’être concentrés, en vertu de l’article 22, point 4, du règlement n° 44/2001 puis de l’article 24, point 4, du règlement n° 1215/2012, devant les juridictions néerlandaises du lieu où les dépôts et les enregistrements sont centralisés et le registre est tenu, peut, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 41 de ses conclusions, et par analogie à ce que le législateur de l’Union a constaté en ce qui concerne la compétence judiciaire pour les litiges relatifs aux marques de l’Union européenne, être qualifiée d’indispensable au bon fonctionnement du régime des marques, dessins et modèles Benelux".
Motif 64 : "Il s’ensuit que l’article 71 du règlement n° 44/2001, lu à la lumière de l’article 350 TFUE, n’empêche pas le Royaume de Belgique, le Grand-Duché de Luxembourg et le Royaume des Pays‑Bas de maintenir en vigueur, en dérogation à l’article 22, point 4, du règlement n° 44/2001 et à l’article 24, point 4, du règlement n° 1215/2012, la règle de compétence judiciaire pour les litiges relatifs aux marques, dessins ou modèles Benelux, qu’ils ont instaurée à l’article 37, paragraphe A, de la LBM [loi uniforme Benelux sur les marques] et à l’article 29, paragraphe 1, de la LBDM [loi uniforme Benelux en matière de dessins ou modèles], puis confirmée à l’article 4.6 de la CBPI [convention Benelux en matière de propriété intellectuelle (marques et dessins ou modèles)]".
Motif 65 : "En ce qui concerne la jurisprudence de la Cour selon laquelle l’application d’une convention en dérogation à une règle instaurée par l’Union en matière de compétence judiciaire, de reconnaissance ou d’exécution, ne saurait porter atteinte aux principes qui sous-tendent la coopération judiciaire en matière civile et commerciale au sein de l’Union, tels que les principes, évoqués pour ce qui concerne la compétence judiciaire aux considérants 11 et 12 du règlement n° 44/2001, de sécurité juridique pour les justiciables et de bonne administration de la justice (voir, notamment, arrêts du 4 mai 2010, TNT Express Nederland, C‑533/08, EU:C:2010:243, point 49, et du 19 décembre 2013, Nipponkoa Insurance, C‑452/12, EU:C:2013:858, point 36), il y a lieu de considérer qu’une disposition telle que l’article 4.6 de la CBPI, qui s’articule autour de la compétence de principe du for du domicile du défendeur, complétée par d’autres fors présentant un lien étroit avec l’objet du litige, est conforme aux principes énoncés auxdits considérants 11 et 12".
Aff. C-616/10, Concl. P. Cruz Villalón
Motif 48 : "Il convient, (…), de s’interroger sur la question de savoir si la portée spécifique de l’article 22, point 4, du règlement n° 44/2001, tel qu’interprété par la Cour [dans l'arrêt GAT, CJCE, 13 juil. 2006, n°4/03], se répercute sur l’application de l’article 31 de ce règlement, dans une situation telle que celle en cause au principal, qui concerne une action en contrefaçon dans le cadre de laquelle l’invalidité d’un brevet européen a été soulevée, à titre incident, comme moyen de défense contre l’adoption d’une mesure provisoire visant l’interdiction de contrefaçon transfrontalière".
Motif 49 : "À cet égard, il y a lieu de relever que, selon la juridiction de renvoi, le juge saisi à titre incident ne rend pas de décision définitive en ce qui concerne la validité du brevet invoqué, mais évalue comment le juge compétent, en vertu de l’article 22, point 4, du règlement n° 44/2001, statuerait à cet égard, et refusera de prendre la mesure provisoire sollicitée s’il estime qu’il existe une chance raisonnable et non négligeable que le brevet invoqué soit annulé par le juge compétent".
Motif 50 : "Dans ces circonstances, il apparaît que le risque de contrariétés des décisions évoqué au point 47 du présent arrêt [en référence à l'arrêt GAT, CJCE, 13 juil. 2006, n°4/03] est inexistant, dès lors que la décision provisoire prise par le juge saisi à titre incident ne préjugera aucunement de la décision à prendre sur le fond par la juridiction compétente au titre de l’article 22, point 4, du règlement n° 44/2001. Ainsi, les raisons qui ont amené la Cour à une interprétation large de la compétence prévue à l’article 22, point 4, du règlement n° 44/2001 n’exigent pas que, dans un cas tel que celui de l’affaire au principal, l’application de l’article 31 dudit règlement soit écartée".
Dispositif (et motif 51) : "L’article 22, point 4, du règlement n° 44/2001 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas, dans des circonstances telles que celles en cause dans l’affaire au principal, à l’application de l’article 31 de ce règlement".
CCE 2014, chron. 1, obs. M.-E. Ancel
Rev. crit. DIP 2013. 472, note E. Treppoz
D. 2013. 1503, obs. F. Jault-Seseke
Dr. et patr. 2013, n° 228, p. 72, note D. Velardocchio
Propr. ind. 2013, chron. 10, obs. E. Py
JCP E 2013. 1074, obs. C. Caron
RTD eur. 2012. 957, obs. E. Treppoz
Gaz. Pal. 17 août 2012, p. 12, obs. L. Marino
Europe 2012, comm. 10, obs. L. Idot
Procédures 2012, comm. 281, obs. C. Nourissat
JDE 2012. 305, n°8, obs. A. Nuyts et H. Boularbah
Aff. C-4/03, Concl. L. A. Geelhoed
Motif 21 : "Quant à la finalité poursuivie [par l’article 16, point 4, de la convention de Bruxelles], il convient d’observer que les règles de compétence exclusive prévues à l’article 16 de la convention ont pour objectif de réserver les litiges visés aux juridictions ayant avec eux une proximité matérielle et juridique".
Motif 22 : "Ainsi la compétence exclusive pour les litiges en matière d’inscription ou de validité des brevets, attribuée aux juridictions des États contractants sur les territoires desquels le dépôt ou l’enregistrement du brevet a été demandé ou a été effectué, est justifiée par le fait que ces juridictions sont les mieux placées pour connaître des cas dans lesquels le litige porte lui-même sur la validité du brevet ou l’existence du dépôt ou de l’enregistrement (arrêt Duijnstee, précité, point 22). Les juridictions de l’État contractant sur le territoire duquel les registres sont tenus peuvent statuer en application de leur droit national sur la validité et les effets des brevets qui ont été délivrés dans cet État. Ce souci d’une bonne administration de la justice revêt d’autant plus d’importance dans le domaine des brevets que, eu égard à la spécificité de la matière, plusieurs États contractants ont mis en place un système de protection juridictionnelle particulier, réservant ce contentieux à des tribunaux spécialisés".
Motif 23 : "Cette compétence exclusive est également justifiée par le fait que la délivrance des brevets implique l’intervention de l’administration nationale (voir, à cet égard, le rapport de M. Jenard relatif à la convention, JO 1979, C 59, p. 1, 36)".
Motif 24 : "S’agissant de la position qu’occupe l’article 16 de la convention [de Bruxelles] dans le système de celle-ci, il y a lieu de relever que les règles de compétence prévues à cet article sont dotées d’un caractère exclusif et impératif qui s’impose avec une force spécifique tant aux justiciables qu’au juge. Les parties ne peuvent y déroger par une convention attributive de juridiction (article 17, quatrième alinéa, de la convention) ni par une comparution volontaire du défendeur (article 18 de la convention). Le juge d’un État contractant saisi à titre principal d’un litige pour lequel une juridiction d’un autre État contractant est compétente en vertu de l’article 16 de la convention doit, d’office, se déclarer incompétent (article 19 de la convention). Une décision rendue en méconnaissance des dispositions dudit article 16 ne bénéficie pas du système de reconnaissance et d’exécution de la convention (articles 28, premier alinéa, et 34, deuxième alinéa, de la convention)".
Motif 25 : "Eu égard à la position qu’occupe l’article 16, point 4, de la convention dans le système de celle-ci et à la finalité poursuivie, il y a lieu de considérer que la compétence exclusive que prévoit cette disposition doit trouver à s’appliquer quel que soit le cadre procédural dans lequel la question de la validité d’un brevet est soulevée, que ce soit par voie d’action ou par voie d’exception, lors de l’introduction de l’instance ou à un stade plus avancé de celle-ci".
Motif 26 : "En premier lieu, permettre au juge qui est saisi d’une action en contrefaçon ou en déclaration de non-contrefaçon de constater, à titre incident, la nullité du brevet en cause porterait atteinte à la nature contraignante de la règle de compétence prévue à l’article 16, point 4, de la convention".
Motif 27 : "En effet, alors que l’article 16, point 4, de la convention n’est pas à la disposition des parties, le demandeur serait en mesure, par la simple formulation des conclusions de sa demande, de contourner le caractère impératif de la règle de compétence posée à cet article".
Motif 28 : "En deuxième lieu, la possibilité ainsi offerte de contourner l’article 16, point 4, de la convention conduirait à une multiplication des chefs de compétence et serait de nature à affecter la prévisibilité des règles de compétence posées par la convention, portant, par voie de conséquence, atteinte au principe de sécurité juridique en tant que fondement de celle‑ci (voir arrêts du 19 février 2002, Besix, C-256/00, Rec. p. I-1699, points 24 à 26, du 1er mars 2005, Owusu, C-281/02, Rec. p. I-1383, point 41, et arrêt de ce jour, Roche Nederland e.a., C-539/03, non encore publié au Recueil, point 37)".
Motif 29 : "En troisième lieu, l’admission, dans le système de la convention, de décisions dans lesquelles des juridictions autres que celles de l’État de délivrance d’un brevet statueraient à titre incident sur la validité de ce brevet multiplierait également le risque de contrariétés de décisions que la convention vise précisément à éviter (voir, en ce sens, arrêts du 6 décembre 1994, Tatry, C-406/92, Rec. p. I-5439, point 52, et Besix, précité, point 27)".
Motif 30 : "L’argument, avancé par LuK et par le gouvernement allemand, selon lequel, d’après le droit allemand, les effets d’une décision statuant à titre incident sur la validité d’un brevet se limitent aux parties à l’instance, ne saurait constituer une réponse adéquate à ce risque. En effet, les effets attachés à une telle décision sont déterminés par le droit national. Or, dans plusieurs États contractants, la décision annulant un brevet a un effet erga omnes. Pour éviter le risque de décisions contradictoires, il serait donc nécessaire de restreindre la compétence des juridictions d’un État autre que celui de délivrance pour statuer à titre incident sur la validité d’un brevet étranger aux seuls cas où le droit national applicable n’attache à la décision à rendre qu’un effet limité aux parties à l’instance. Une telle restriction conduirait cependant à des distorsions, mettant ainsi en cause l’égalité et l’uniformité des droits et des obligations qui découlent de la convention pour les États contractants et pour les personnes intéressées (arrêt Duijnstee, précité, point 13)".
Motif 31 : "Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la question posée que l’article 16, point 4, de la convention doit être interprété en ce sens que la règle de compétence exclusive qu’il édicte concerne tous les litiges portant sur l’inscription ou la validité d’un brevet, que la question soit soulevée par voie d’action ou d’exception".
Dispositif (et motif 31) : "L’article 16, point 4, de la convention du 27 septembre 1968 (…), doit être interprété en ce sens que la règle de compétence exclusive qu’il édicte concerne tous les litiges portant sur l’inscription ou la validité d’un brevet, que la question soit soulevée par voie d’action ou d’exception".
Aff. 288/82, Concl. S. Rozès
Motif 19 : "La notion de litige "en matière d'inscription ou de validité des brevets", mentionnée à l'article 16, paragraphe 4, doit elle être considérée comme une notion autonome destinée à recevoir une application uniforme dans tous les États contractants".
Motif 22 : "Il importe d'observer que la compétence exclusive pour les litiges en matière d'inscription ou de validité des brevets, attribuée aux juridictions des États contractants sur les territoires desquels le dépôt ou l'enregistrement du brevet a été demandé ou a été effectué, est justifiée par le fait que ces juridictions sont les mieux placées pour connaître des cas dans lesquels le litige porte lui-même sur la validité du brevet ou l'existence du dépôt ou de l'enregistrement".
Motif 23 : "En revanche, ainsi qu'il est expressément mentionné dans le rapport d'experts concernant la convention de Bruxelles (JO C 59, p. 36), pour "les autres actions, y compris les actions en contrefaçon, les règles générales de la convention sont applicables". Cette indication confirme le caractère restrictif de la disposition de l'article 16, paragraphe 4".
Motif 24 : "Il s'ensuit que sont à considérer comme des litiges "en matière d'inscription ou de validité des brevets" les litiges dans lesquels l'attribution d'une compétence exclusive aux juges du lieu de délivrance du brevet est justifiée à la lumière des éléments susmentionnés, tels que les litiges portant sur la validité, l'existence ou la déchéance du brevet ou sur la revendication d'un droit de priorité au titre d'un dépôt antérieur".
Motif 25 : "Si, par contre, le litige ne porte pas lui-même sur la validité du brevet ou l'existence du dépôt ou de l'enregistrement, il faut estimer qu'aucune raison particulière ne plaide pour l'attribution d'une compétence exclusive aux juridictions de l'État contractant où le brevet a été demandé ou délivré et que, par conséquent, un tel litige ne relève pas de l'article 16, paragraphe 4".
Dispositif 3 (et motif 28) : "La notion de litige "en matière d'inscription ou de validité des brevets" ne recouvre pas un différend entre un employé, auteur d'une invention pour laquelle un brevet a été demandé ou obtenu, et son employeur lorsque le litige porte sur leurs droits respectifs sur ce brevet découlant de leur relation de travail".
RTD eur. 1984. 316, obs. G. Bonet
JCP E 1984. I. 13389, obs. G. Bonet, J.-B. Blaise
Rev. crit. DIP 1984. 366, note G. Bonet
Motif : "(...) l'article 16-4 précité qui pose une règle exclusive de compétence en matière d'inscription ou de validité de brevets, marques, dessins et modèles et autres droits analogues donnant lieu à dépôt ou à enregistrement ne s'applique pas aux litiges portant sur l'appartenance de ces droits".
Europe 2006, n° 299, obs. L. Idot
RDAI/IBLJ 2006. 562
JCP E 2007, n°1039, note S. Hovasse
Propr. ind. 2006. Etude 10, obs. A.-C. Chiariny-Daudet
D. 2006. 2932, obs. Y. Auget
D. 2007. 342, obs. J. Raynard
[Sont seuls compétents, sans considération de domicile:]
5) en matière d'exécution des décisions, les tribunaux de l'État membre du lieu de l'exécution.
Aff. C-242/20, Concl. H. Saugmandsgaard Øe
Dispositif 1 (et motif 37) : "L’article 22, point 5, du règlement (CE) n° 44/2001 (…) doit être interprété en ce sens qu’une action en restitution fondée sur un enrichissement sans cause ne relève pas de la compétence exclusive prévue à cette disposition, alors même qu’elle a été engagée en raison de l’expiration du délai dans lequel la restitution des sommes indûment versées lors d’une procédure d’exécution forcée peut être réclamée dans la cadre de cette même procédure d’exécution".
Partie requérante: HRVATSKE Šume d.o.o., Zagreb, venant aux droits de HRVATSKE ŠUME javno poduzeće za gospodarenje šumama i šumskim zemljištima u Republici Hrvatskoj p.o., Zagreb
Partie défenderesse: BP EUROPA SE, venant aux droits de DEUTSCHE BP AG, venant elle-même aux droits de THE BURMAH OIL (Deutschland) GmbH
2) Les procédures contentieuses engagées en raison de l’existence d’un délai dans lequel la restitution des sommes indûment versées dans le cadre d’une procédure d’exécution forcée peut être réclamée dans le cadre de la même procédure d’exécution judiciaire relèvent-elles du chef de compétence exclusive prévu à l’article 22, point 5, du règlement (CE) n° 44/2001, aux termes duquel, en matière d’exécution des décisions, sont seuls compétents, sans considération de domicile, les tribunaux de l’État membre du lieu de l’exécution?
Aff. C-261/90, Concl. C. Gulmann
Motif 26 : "Il faut prendre en considération le fait que le motif essentiel de la compétence exclusive des tribunaux du lieu d'exécution du jugement est qu'il n'appartient qu' aux tribunaux de l'État membre sur le territoire duquel l'exécution forcée est requise d'appliquer les règles concernant l'action, sur ce territoire, des autorités chargées de l'exécution forcée".
Motif 27 : "Il convient de relever (...) que le rapport établi par le comité des experts ayant élaboré le texte de la convention (JO 1979, C 59, p. 1) indique qu' il faut entendre par "contestations relatives à l'exécution des jugements" les contestations auxquelles peut donner lieu le "recours à la force, à la contrainte ou à la dépossession de biens meubles et immeubles en vue d' assurer la mise en oeuvre matérielle des décisions, des actes" et que "les difficultés nées de ces procédures sont de la compétence exclusive du tribunal du lieu de l'exécution".
Motif 28 : "Une action du type de l'action "paulienne" du droit français a pour objet (...) de protéger le droit de gage du créancier en demandant au juge compétent d' ordonner la révocation à l'égard du créancier de l'acte de disposition passé par le débiteur en fraude de ses droits. Si elle préserve ainsi les intérêts du créancier, en vue, notamment, d'une exécution forcée ultérieure de l'obligation, elle ne vise pas à faire trancher une contestation relative au "recours à la force, à la contrainte ou à la dépossession de biens meubles et immeubles en vue d' assurer la mise en oeuvre matérielle des décisions, des actes" et elle n' entre pas, par suite, dans le champ d'application de l' article 16, paragraphe 5, de la convention".
Dispositif (et motif 36): "Une action prévue par le droit national, telle l'action "paulienne" du droit français, par laquelle un créancier tend à obtenir la révocation, à son égard, d'un acte translatif de droits réels immobiliers accompli par son débiteur d' une façon qu'il estime être en fraude de ses droits ne relève pas du champ d'application des articles 5, paragraphe 3, 16, paragraphe 5, et 24 de la convention du 27 septembre 1968 (...)".
Aff. 220/84, Concl. C. O. Lenz
Motif 17 : "Il résulte de la spécificité du lien exigé par l'article 16 qu'une partie ne saurait se prévaloir de la compétence que le numéro 5 de cet article attribue aux tribunaux du lieu de l'exécution pour saisir ces tribunaux, par voie d'exception, d'un litige qui relève des tribunaux d'un autre État contractant en vertu de l'article 2. L'utilisation, à une telle fin, de l'action en opposition à exécution est contraire à la répartition des compétences entre le juge du domicile du défendeur et le juge du lieu de l'exécution, voulue par la convention".
Motif 18 : "Dans le cas d'espèce, les juridictions allemandes s'étant déjà déclarées incompétentes pour connaître de la créance mise en avant au titre de compensation, le fait d'invoquer cette créance, afin de rencontrer l'exécution d'une décision relative aux dépens judiciaires encourus dans la même procédure, constitue, de la part de la partie requérante, un détournement manifeste de procédure en vue d'obtenir indirectement, des juridictions allemandes, une décision portant sur une créance pour l'examen de laquelle ces juridictions n'ont pas compétence en vertu de la convention".
Dispositif (et motif 19) : "Les actions en opposition à exécution, telles qu'elles sont prévues par l'article 767 du code allemand de procédure civile, relèvent, en tant que telles, de la règle de compétence de l'article 16, numéro 5, de la convention, mais cette dernière disposition ne permet pas, pour autant, de demander devant les tribunaux de l'État contractant du lieu d'exécution, par la voie d'une action en opposition à exécution, la compensation entre le droit en vertu duquel l'exécution est poursuivie et une créance sur laquelle les tribunaux de cet État contractant ne seraient pas compétents pour statuer si elle faisait l'objet d'une action autonome".
Rev. crit. DIP 1986. 142, note E. Mezger
Gaz. Pal. 1985, I, Jur. p. 551, note J. Mauro
Rev. Marché commun 1987, n° 304, p. 101, obs. L. Focsaneanu
Motifs : "Attendu que, pour dire le juge français compétent sur le fondement de l'article 22 du règlement n° 44/2001, l'arrêt retient que les contestations relatives à l'exécution des jugements, au sens de ce texte, sont toutes celles qui donnent lieu au recours à la force, à la contrainte ou à la dépossession de biens meubles et immeubles en vue d'assurer la mise en oeuvre matérielle des décisions et d'actes ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les décisions rendues par des juridictions non soumises à ce règlement [ici une décision de la cour fédérale suprême des Emirats arabes unis] ne peuvent entrer indirectement dans son champ d'application par le biais de procédures d'exécution introduites dans les Etats membres, la cour d'appel a violé les textes susvisés".