Les effets de la procédure d'insolvabilité sur une instance en cours concernant un bien ou un droit dont le débiteur est dessaisi sont régis exclusivement par la loi de l'État membre dans lequel cette instance est en cours.
Dispositif : "L’article 15 du règlement (CE) n° 1346/2000 (...) , doit être interprété en ce sens qu’il s’applique à une instance en cours devant une juridiction d’un État membre ayant pour objet la condamnation d’un débiteur au paiement d’une somme d’argent, due en vertu d’un contrat de prestation de services, ainsi qu’à une indemnisation pécuniaire pour non-respect de cette même obligation contractuelle, dans le cas où ce débiteur a été déclaré insolvable dans le cadre d’une procédure d’insolvabilité ouverte dans un autre État membre et où cette déclaration d’insolvabilité s’étend à l’ensemble du patrimoine dudit débiteur".
Aff. C-212/15, Concl. M. Bobek
Motif 32 : "En effet, cette disposition doit être lue en combinaison avec l’article 4, paragraphe 2, sous f), du règlement n° 1346/2000, qui distingue les « instances en cours » des autres poursuites individuelles. Ainsi, les effets de la procédure d’insolvabilité sur les poursuites individuelles autres que les « instances en cours » sont en tout état de cause régis par la seule lex fori concursus. Or, comme l’a exposé M. l’avocat général aux points 67 à 78 de ses conclusions, les procédures visant à l’exécution forcée d’une créance relèvent de cette dernière catégorie".
Motif 33 : "À ce dernier égard, il convient d’ajouter que le règlement n° 1346/2000 repose sur le principe selon lequel l’exigence d’égalité de traitement des créanciers, qui sous-tend, mutatis mutandis, toute procédure d’insolvabilité, s’oppose, en règle générale, aux poursuites individuelles au moyen de procédures d’exécution forcée, introduites et menées alors qu’une procédure d’insolvabilité contre le débiteur est pendante. Ainsi, l’article 20, paragraphe 1, du règlement n° 1346/2000 impose au créancier qui obtient, « notamment par des voies d’exécution », satisfaction en ce qui concerne sa créance sur des biens du débiteur qui se trouvent sur le territoire d’un État membre autre que l’État d’ouverture, de restituer au syndic ce qu’il a obtenu".
Motif 34 : "Or, il serait contradictoire d’interpréter l’article 15 du règlement n) 1346/2000 en ce sens qu’il viserait également les procédures d’exécution forcée, avec la conséquence que les effets de l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité relèveraient ainsi de la loi de l’État membre dans lequel une telle procédure d’exécution forcée est en cours, alors que, parallèlement, l’article 20, paragraphe 1, de ce règlement, en imposant expressément la restitution au syndic de ce qui a été obtenu par des « voies d’exécution », priverait ainsi cet article 15 de son effet utile".
Motif : "(…) en présence d'une décision ayant ouvert la procédure principale d'insolvabilité dans un État membre de l'Union européenne et d'une instance en cours devant une juridiction d'un autre État membre en vue de l'ouverture d'une procédure identique à l'égard du même débiteur, le conflit se résout en faveur de la décision d'ouverture déjà intervenue qui doit être internationalement reconnue, et non en fonction des dates respectives de saisine des juridictions ou par application de la loi désignée par l'article 15 du règlement [n° 1346/2000], lequel, ne concernant que les instances relatives à un bien ou un droit dont le débiteur est dessaisi, ne vise pas l'instance en ouverture de la procédure".
Dalloz actualité, 10 juin 2014, obs. F. Mélin
LPA 2014, n° 184, p. 5, obs. J.-P. Sortais
JCP 2014, 1501, n° 11, obs. M. Menjucq
Rev. sociétés 2014. 737, note T. Mastrullo