Convention de Bruxelles

CJCE, 21 mai 1980, Denilauler, Aff. 125/79 [Conv. Bruxelles]

Aff. 125/79Concl. H. Mayras 

Motif 16 : "C'est certainement le juge du lieu ou en tout cas de l'État contractant où sont situés les avoirs qui feront l'objet des mesures sollicitées qui est le mieux à même d'apprécier les circonstances qui peuvent amener à octroyer ou à refuser les mesures sollicitées ou à prescrire des modalités et des conditions que le requérant devra respecter afin de garantir le caractère provisoire et conservatoire des mesures autorisées. La convention a tenu compte de ces nécessités en prévoyant dans son article 24 que les mesures provisoires ou conservatoires prévues par la loi d'un État contractant peuvent être demandées aux autorités judiciaires de cet État, même si, en vertu de la convention, une juridiction d'un autre État contractant est compétente pour connaître du fond".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

Civ. 1e, 13 avr. 1999, n° 97-17626 [Conv. Bruxelles, art. 24]

Motif : "Attendu, aux termes [de l'article 24], que les mesures provisoires ou conservatoires prévues par la loi d'un Etat contractant peuvent être demandées aux autorités judiciaires de cet Etat même si, en vertu de la Convention, une juridiction d'un autre Etat contractant est compétente pour connaître du fond ; que selon l'interprétation donnée à ce texte par la Cour de justice (...) dans son arrêt n° C 391/95 du 17 novembre 1998, le paiement à titre de provision d'une contre-prestation contractuelle ne constitue pas une mesure provisoire, à moins que, d'une part, le remboursement au défendeur de la somme allouée soit garanti dans l'hypothèse où le demandeur n'obtiendrait pas gain de cause au fond de l'affaire et, d'autre part, la mesure sollicitée ne porte que sur des avoirs déterminés du défendeur se situant, ou devant se situer, dans la sphère de la compétence territoriale du juge saisi (...); qu'en [considérant l'ordonnance du juge statuant en référé sur une demande de versement de provision une mesure provisoire prévue par la loi française au sens de l'article 24 de la convention de Bruxelles] sans rechercher si la condamnation à la provision sollicitée pouvait être exécutée en France, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

Civ. 1e, 30 juin 2004, n° 01-03248, 01-15452 [Conv. Bruxelles, art. 24]

Motif : "(…) attendu (…) que l’injonction du 24 avril 1998 [injonction mareva], par laquelle il est fait défense à M. X... d’effectuer toute opération sur l’un quelconque de ses biens dans les limites fixées par le juge, est une mesure conservatoire et provisoire de nature civile qui, aux fins de la reconnaissance sollicitée, doit être examinée indépendamment de la sanction pénale ("contempt of court") qui l’assortit dans l’Etat d’origine ; que cette interdiction faite à la personne du débiteur de disposer en tout lieu de ses biens, dans la mesure où il s’agit de préserver les droits légitimes du créancier, ne saurait porter atteinte à un droit fondamental du débiteur, ni même indirectement, à une prérogative de souveraineté étrangère et, notamment, n’affecte pas, à la différence des injonctions dites "anti-suit", la compétence juridictionnelle de l’Etat requis ; que n’étant donc pas contraire à l’ordre public international, elle peut être reçue dans l’ordre juridique français, ainsi que l’a exactement décidé l’arrêt attaqué, dès lors que sont réunies les autres conditions de la reconnaissance et de l’exécution".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 21 mai 1980, Denilauler, Aff. 125/79 [Conv. Bruxelles]

Aff. 125/79Concl. H. Mayras 

Motif 15 : "Une analyse de la fonction reconnue dans l'ensemble du système de la convention à l'article 24, spécialement consacré aux mesures provisoires et conservatoires, conduit (…) à la conclusion qu'en ce qui concerne ce genre de mesures un régime spécial a été envisagé. S'il est exact que des procédures du type de celles en cause [une saisie conservatoire] autorisant des mesures provisoires et conservatoires sont connues dans le système juridique de tous les États contractants et peuvent, lorsque certaines conditions sont réunies, être considérées comme ne violant pas les droits de la défense, il y a cependant lieu de souligner que l'octroi de ce genre de mesures demande de la part du juge une circonspection particulière et une connaissance approfondie des circonstances concrètes dans lesquelles la mesure est appelée à faire sentir ses effets.

Suivant le cas, et notamment suivant les usages commerciaux, il doit pouvoir limiter son autorisation dans le temps ou, en ce qui concerne la nature des avoirs ou marchandises qui font l'objet des mesures envisagées, exiger des garanties bancaires ou désigner un séquestre, et de façon générale subordonner son autorisation à toutes les conditions qui garantissent le caractère provisoire ou conservatoire de la mesure qu'il ordonne".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 27 avr. 1999, Hans-Hermann Mietz, Aff. C-99/96 [Conv. Bruxelles, art. 24]

Aff. C-99/96Concl. P. Léger 

Motif 34 : "II y a lieu de préciser, à titre liminaire, que les articles 289 à 297 du code de procédure civile néerlandais (...) concernent une forme de procédure, dénommée "kort geding", qui permet au président de l'Arrondissementsrechtbank d'accorder des mesures exécutoires "dans toutes les affaires qui, compte tenu des intérêts des parties, requièrent une mesure immédiate en raison de l'urgence" (article 289, paragraphe 1)". 

Motif 38 : "Dans ces conditions, il convient de constater que la kort geding est une procédure du type de celles visées à l'article 24 de la convention selon lequel une juridiction est autorisée, par la loi de son État, à ordonner des mesures provisoires ou conservatoires même si, en vertu de la convention, elle n'est pas compétente pour connaître du fond".

Motif 42 : "En revanche, s'agissant d'un jugement prononcé uniquement en vertu de la compétence prévue à l'article 24 de la convention et ordonnant le paiement par provision d'une contre-prestation contractuelle, la Cour a dit pour droit, dans l'arrêt Van Uden, précité, qu'un tel jugement ne constitue pas une mesure provisoire au sens de cette disposition à moins que, d'une part, le remboursement au défendeur de la somme allouée soit garanti dans l'hypothèse où le demandeur n'obtiendrait pas gain de cause au fond de l'affaire et, d'autre part, la mesure ordonnée ne porte que sur des avoirs déterminés du défendeur se situant, ou devant se situer, dans la sphère de la compétence territoriale du juge saisi".

Dispositif (et motif 43) : "Un jugement ordonnant un paiement par provision d'une contre-prestation contractuelle, prononcé au terme d'une procédure telle que celle prévue aux articles 289 à 297 du code néerlandais par une juridiction n'étant pas compétente en vertu de la convention pour connaître du fond de l'affaire, n'est pas une mesure provisoire susceptible d'être octroyée en vertu de l'article 24 de la convention à moins que, d'une part, le remboursement au défendeur de la somme allouée soit garanti dans l'hypothèse où le demandeur n'obtiendrait pas gain de cause au fond de l'affaire et, d'autre part, la mesure ordonnée ne porte que sur des avoirs déterminés du défendeur se situant, ou devant se situer, dans la sphère de la compétence territoriale du juge saisi".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 28 avr. 2005, St. Paul Dairy, Aff. C-104/03 [Conv. Bruxelles, art. 24]

Aff. C-104/03, Concl. R.-J. Colomer

Motif 11 : "L’article 24 de la convention autorise une juridiction d’un État contractant à statuer sur une demande de mesure provisoire ou conservatoire alors qu’elle n’est pas compétente pour connaître du fond du litige. Cette disposition prévoit ainsi une exception au système de compétence organisé par la convention et doit donc être interprétée de manière restrictive". 

Motif 13 : "(…) par "mesures provisoires ou conservatoires" au sens de l’article 24 de la convention, il y a lieu d’entendre les mesures qui, dans les matières relevant du champ d’application de la convention, sont destinées à maintenir une situation de fait ou de droit afin de sauvegarder des droits dont la reconnaissance est par ailleurs demandée au juge du fond (arrêts du 26 mars 1992, Reichert et Kockler, C-261/90, Rec. p. I2149, point 34, et Van Uden, précité, point 37)".

Motif 14 : "L’octroi de telles mesures demande de la part du juge, outre une circonspection particulière, une connaissance approfondie des circonstances concrètes dans lesquelles la mesure est appelée à produire ses effets. De façon générale, il doit subordonner son autorisation à toutes les conditions qui garantissent le caractère provisoire ou conservatoire de la mesure qu’il ordonne (arrêts du 21 mai 1980, Denilauler, 125/79, Rec. p. 1553, point 15, et Van Uden, précité, point 38)".

Motif 24 : "Ces considérations suffisent pour exclure qu’une mesure dont l’objectif est de permettre au demandeur d’apprécier les chances ou les risques d’un éventuel procès puisse être qualifiée de mesure provisoire ou conservatoire au sens de l’article 24 de la convention".

Dispositif (et motif 25) : "L’article 24 de la convention doit être interprété en ce sens que ne relève pas de la notion de "mesures provisoires ou conservatoires" une mesure [prévue par le droit néerlandais] ordonnant l’audition d’un témoin dans le but de permettre au demandeur d’évaluer l’opportunité d’une action éventuelle, de déterminer le fondement d’une telle action et d’apprécier la pertinence des moyens pouvant être invoqués dans ce cadre". 

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 27 mars 1979, De Cavel I, Aff. 143/78 [Conv. Bruxelles]

Aff. 143/78, Concl. J.-P. Warner 

Motif 7 : "Attendu que le règlement provisoire des rapports juridiques patrimoniaux entre époux, lorsqu'il s'impose au cours d'une instance en divorce, est étroitement lié aux causes du divorce, à la situation personnelle des époux ou des enfants nés du mariage et est, à ce titre, inséparable des questions d'état des personnes soulevées par la dissolution du lien conjugal ainsi que de la liquidation du régime matrimonial ; qu'il s'ensuit que la notion "régimes matrimoniaux" comprend non seulement les régimes de biens spécifiquement et exclusivement conçus par certaines législations nationales en vue du mariage, mais également tous les rapports patrimoniaux résultant directement du lien conjugal ou de la dissolution de celui-ci ; que des litiges portant sur les biens des époux au cours d'une instance en divorce peuvent, dès lors, suivant le cas concerner, ou se trouver étroitement liés à : 1) soit des questions relatives à l'état des personnes ; 2) soit des rapports juridiques patrimoniaux entre époux résultant directement du lien conjugal ou de la dissolution de celui-ci ; 3) soit encore des relations juridiques patrimoniales existant entre eux, mais sans rapport avec le mariage ; que si les litiges de la dernière catégorie rentrent dans le champ d'application de la Convention, ceux relatifs aux deux premières doivent en être exclus".

Motif 8 : "Attendu que les considérations qui précèdent valent tant pour les mesures provisoires relatives aux biens des époux que pour celles ayant un caractère définitif ; que des mesures provisoires de sauvegarde relatives à des biens - telles des appositions de scellés ou des saisies - étant aptes à sauvegarder des droits de nature fort variée, leur appartenance au champ d'application de la Convention est déterminée, non par leur nature propre, mais par la nature des droits dont elles assurent la sauvegarde".

Motif 9 : "Attendu par ailleurs que la Convention ne fournit aucune base juridique permettant de distinguer, quant à son champ d'application matériel, entre mesures provisoires et définitives".

Dispositif (et motif 10) : "Les décisions judiciaires autorisant des mesures de sauvegarde provisoires - telles des appositions de scellés ou des saisies sur les biens des époux - au cours d'une procédure de divorce, ne relèvent pas du champ d'application de la Convention, tel qu'il est défini à l'article 1 de celle-ci, dès lors que ces mesures concernent, ou sont étroitement liées à, soit des questions d'état des personnes impliquées dans l'instance en divorce, soit des rapports juridiques patrimoniaux, résultant directement du lien conjugal ou de la dissolution de celui-ci".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 6 mars 1980, De Cavel II, Aff. 120/79 [Conv. Bruxelles]

 Aff. 120/79, Concl. J.-P. Warner 

Motif 4 : "Selon l'article 1, alinéa 1, de la Convention, le champ d'application de celle-ci s'étend à la « matière civile et commerciale ». Toutefois, certaines matières, bien que relevant de cette notion, ont par exception été écartées de ce champ par l'alinéa 2 de la même disposition. Tel est le cas, entre autres, de l'état et de la capacité des personnes physiques, des régimes matrimoniaux, des testaments et des successions".

Motif 5 : "Il est constant que la matière des obligations alimentaires rentre par elle-même dans la notion de "matiere civile" et que, n'étant pas reprise dans les exceptions prévues par l'alinéa 2 de l'article 1 de la convention, elle relève dès lors du champ d'application de celle-ci. L'article 5, chiffre 2, de la convention confirme, pour autant que de besoin, cette appartenance. D'autre part, les "prestations compensatoires" prévues par les articles 270 et suivants du Code civil français et visées par la deuxième question concernent les obligations financières éventuelles entre ex-époux après le divorce fixées à raison des ressources et besoins réciproques et ont également un caractère alimentaire. Elles appartiennent ainsi à la matière civile au sens de l'article 1, alinéa 1, de la Convention et, dès lors, au champ d'application de celle-ci, à défaut d'en avoir été écarté par l'alinéa 2 de ce même article".

Motif 6 : "Il s'agit dès lors uniquement d'examiner si la circonstance qu'une décision judiciaire en matière d'obligations alimentaires se situe dans le cadre d'une procédure en divorce - laquelle relève indiscutablement de l'état des personnes et est par conséquent soustraite du champ d'application de la Convention - a pour conséquence que le litige en matière d'obligations alimentaires devrait, en tant qu'accessoire de la procédure en divorce, être, lui aussi, écarté de ce champ d'application, avec la conséquence qu'il ne pourrait bénéficier, entre autres, des formes simplifiées de reconnaissance, prévues aux articles 26 à 30, et d'exécution, prévues aux articles 31 à 45".

Motif 9 : "Les demandes accessoires relèvent dès lors du champ d'application de la Convention suivant la matière qu'elles concernent et non suivant la matière dont relève la demande principale. C'est par application de cette règle que la Cour, dans son arrêt du 27 mars 1979 (affaire n° 143/78, de Cavel, Recueil p. 1055), rendu entre les mêmes parties, a jugé qu'une demande d'apposition de scellés dans le cadre d'une procédure en divorce ne relevait pas du champ d'application de la Convention, non à cause de son caractère accessoire, mais parce qu'il apparaissait que, par son objet propre, elle relevait, en l'occurrence, du régime matrimonial des époux".

Motif 10 : "D'autre part, la Cour a déjà reconnu dans ce même arrêt que la nature provisoire ou définitive des décisions judiciaires n'était pas pertinente en ce qui concerne leur appartenance au champ d'application de la Convention. Il faut dès lors écarter l'argument tiré de ce que l'obligation alimentaire ne serait imposée qu'à titre provisoire et pour la durée du divorce".

Motif 11 : "II résulte des considérations qui précèdent que le champ d'application de la Convention s'étend aussi et pour les mêmes motifs aux obligations alimentaires que la loi ou le juge impose à des époux pour la période postérieure au divorce".

Dispositif (et motif 12) : "La Convention du 27 septembre 1968 (…) est applicable, d’une part, à l’exécution d’une mesure provisoire ordonnée par un juge français dans une procédure de divorce par laquelle l’une des parties à l’instance obtient une pension alimentaire mensuelle et, d’autre part, à une prestation compensatoire provisoire payable mensuellement, qu’un jugement de divorce français accorde à une partie au titre des articles 270 et suivants du Code civil français".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 31 mars 1982, CHW c. GJH, Aff. 25/81 [Conv. Bruxelles]

Aff. 25/81, Concl. S. Rozès 

Motif 8 : "(…) une demande de mesures provisoires tendant à obtenir la remise d'un document afin d'empêcher que les déclarations qui y figurent soient utilisées comme preuve dans un litige concernant la gestion des biens de la femme [par l’époux de celle-ci] est (…), en raison de son caractère accessoire, à considérer comme se rattachant aux régimes matrimoniaux au sens de la Convention".

Motif 12 : "[L’article 24] vise en effet le cas de mesures provisoires ordonnées dans un État contractant lorsque la juridiction d'un autre Etat contractant est «en vertu de la présente Convention » compétente pour connaître du fond. Elle ne saurait, dès lors, être invoquée pour faire rentrer dans le champ d'application de la Convention les mesures provisoires ou conservatoires relatives à des matières qui en sont exclues".

Dispositif 1 (et motif 9) : "Une demande de mesures provisoires tendant à obtenir la remise d'un document afin d'empêcher son utilisation comme preuve dans un litige concernant la gestion des biens de la femme par le mari ne relève pas du champ d'application de la convention du 27 septembre 1968 (...) si cette gestion se rattache étroitement aux rapports patrimoniaux qui résultent directement du lien conjugal".

Dispositif 2 (et motif 12) : "L'article 24 de la Convention du 27 septembre 1968 (...) ne peut être invoqué pour faire rentrer dans le champ d'application de la Convention les mesures provisoires ou conservatoires relatives à des matières qui en sont exclues". 

Bruxelles I (règl. 44/2001)

Civ. 1e, 27 juin 2000, n° 98-18747 [Conv. Bruxelles]

Motif : "Mais attendu que la cour d'appel a retenu que la contre-garantie donnée par les époux X... à la [défenderesse] par un acte dont aucune disposition ne dérogeait à la compétence naturelle du juge italien, constituait une garantie autonome par rapport au contrat de crédit consenti à Mlle X... et que la mention de ce contrat selon laquelle la garantie était donnée dans l'intérêt de leur fille, ne saurait suffire à faire suivre à cette garantie le régime applicable au contrat de crédit ; que par ces énonciations, la cour d'appel a souverainement décidé l'absence de lien de connexité [au sens de l'article 6. 1° de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968]".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

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