Motif 29 : "Il ressort ainsi des termes de l’article 10, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 650/2012 que les deux critères prévus par cette disposition, aux fins de l’attribution de la compétence aux juridictions d’un État membre dans le cas où la résidence habituelle du défunt au moment de son décès n’est pas située dans cet État membre, sont, d’une part, l’existence de biens successoraux dans ledit État membre et, d’autre part, la possession de la nationalité du même État membre, par le défunt, au moment de son décès. Il ne découle, en revanche, nullement de ces termes que l’attribution d’une telle compétence dépendrait d’une action quelconque de la part du défunt ou d’une partie intéressée. Bien au contraire, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé, en substance, aux points 67 et 68 de ses conclusions, l’emploi de l’expression « sont […] compétentes », est de nature à indiquer que les compétences prévues à l’article 10, paragraphe 1, de ce règlement ont un caractère obligatoire".
Motif 33 : "Il y a lieu de relever, à cet égard, que, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé aux points 47 et 65 de ses conclusions, il n’existe pas de rapport hiérarchique entre le for établi à l’article 4 du règlement n° 650/2012 et le for établi à l’article 10 de celui-ci, puisque chacun d’entre eux vise des cas de figure distincts. De même, le fait que les compétences visées à l’article 10 de ce règlement soient qualifiées de « subsidiaires » ne signifie pas que cette disposition serait moins contraignante que celle de l’article 4 dudit règlement, relative à la compétence générale".
Motif 36 : "(…) le règlement n° 650/2012 prévoit les règles de compétence juridictionnelle internationale pour l’ensemble de la succession, lesquelles sont fondées sur des critères objectifs. Dans cette perspective, l’article 10, paragraphe 1, de ce règlement contribue à garantir l’accès à la justice des héritiers et des légataires, des autres personnes proches du défunt ainsi que des créanciers d’une succession, lorsque la situation concernée présente des liens étroits avec un État membre en raison, notamment, de l’existence de biens successoraux sur le territoire de ce dernier".
Motif 41 : "Ainsi, dans la mesure où les règles de compétence subsidiaire établies à l’article 10, paragraphe 1, du règlement n° 650/2012 contribuent à réaliser cet objectif de bonne administration de la justice, l’application de cette disposition ne saurait dépendre du fait qu’elle n’a pas été invoquée par l’une ou l’autre partie à la procédure concernée".
Motif 42 : "En effet, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 87 de ses conclusions, il convient d’interpréter l’article 10 du règlement n° 650/2012 à la lumière de l’article 15 de celui-ci, en ce sens que, si cet article 10 n’oblige pas la juridiction saisie, à rechercher activement une base factuelle pour statuer sur sa compétence dans un litige donné, ledit article lui impose de déterminer, en prenant en considération les faits non contestés, le fondement de sa compétence, lequel peut éventuellement être distinct de celui allégué par le requérant".
Motif 43 : "En particulier, il y a lieu de relever qu’une déclaration d’incompétence, par la juridiction saisie en vertu de l’article 15 du règlement n° 650/2012, nécessite un examen préalable de tous les critères établis au chapitre II du règlement n° 650/2012 et que, dans le cadre de cet examen, cette juridiction est tenue d’examiner sa compétence éventuelle à la lumière de toutes les informations dont elle dispose. Dès lors, un tel examen ne saurait être effectué au regard de la seule règle de compétence expressément invoquée par les parties intéressées".
Motif 44 : "Cette interprétation n’est pas remise en cause par l’argumentation de la juridiction de renvoi, selon laquelle l’article 10 du règlement n° 650/2012 dérogerait au principe de la coïncidence des compétences judiciaire et législative de sorte que la juridiction saisie serait conduite à appliquer la loi de l’État de résidence habituelle du défunt au moment de son décès. En effet, l’objectif, visé au considérant 27 de ce règlement, de faire coïncider la compétence juridictionnelle et le droit applicable ne revêt pas, comme M. l’avocat général l’a relevé au point 70 de ses conclusions, un caractère absolu".
Dispositif : "L'article 10, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) n° 650/2012 (…), doit être interprété en ce sens qu’une juridiction d’un État membre doit relever d’office sa compétence au titre de la règle de compétence subsidiaire prévue à cette disposition lorsque, ayant été saisie sur le fondement de la règle de compétence générale établie à l’article 4 de ce règlement, elle constate qu’elle n’est pas compétente au titre de cette dernière disposition".