Lynxlex
Published on Lynxlex (https://www.lynxlex.com)


Article 25.1 et 25.5 [Conditions de fond]

1. Si les parties, sans considération de leur domicile, sont convenues d’une juridiction ou de juridictions d’un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ces juridictions sont compétentes, sauf si la validité de la convention attributive de juridiction est entachée de nullité quant au fond selon le droit de cet État membre. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties.

[...]

5. Une convention attributive de juridiction faisant partie d’un contrat est considérée comme un accord distinct des autres clauses du contrat.

La validité de la convention attributive de juridiction ne peut être contestée au seul motif que le contrat n’est pas valable.

MOTS CLEFS: 
Convention attributive de juridiction

Q. préj. (AT), 5 mai 2020, Laudmotion, Aff. C-189/20

Aff. C-189/20

Partie requérante: Laudmotion GmbH

Partie défenderesse: Verein für Konsumenteninformation

1) Les dispositions du règlement (UE) n° 1215/2012, notamment l’article 25, l’article 17, paragraphe 3, et l’article 19, le cas échéant en considérant également l’article 67, doivent-elles être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent au contrôle du caractère abusif de conventions internationales attributives de juridiction au regard de la directive 93/13/CEE ou des dispositions nationales de transposition correspondantes ?

2) L’article 25, paragraphe 1, dernière partie de la première phrase, du règlement n° 1215/2012 («sauf si la validité de la convention attributive de juridiction est entachée de nullité quant au fond selon le droit de cet État membre») doit-il être interprété en ce sens qu’il ouvre la possibilité d’un contrôle au fond — allant également au-delà du domaine de droit harmonisé — conformément au droit national de l’État membre dont les juridictions sont compétentes en vertu d’une convention attributive de juridiction

3) En cas de réponse négative aux questions 1 et 2 : 

Les dispositions nationales de transposition applicables aux fins du contrôle du caractère abusif au regard de la directive 93/13 sont-elles déterminées par le droit de l’État membre dont les juridictions sont compétentes en vertu d’une convention attributive de juridiction ou par la lex causae de l’État membre de la juridiction saisie ?

MOTS CLEFS: 
Convention attributive de juridiction
Validité (au fond)
Clauses abusives
Droit national

Q. préj. (BG), 8 oct. 2018, EN, FM, GL, Aff. C-629/18 [radiation]

Aff. C-629/18

Partie requérante: EN, FM, GL

Partie défenderesse: Ryanair Designated Activity Company

Est-il possible en vertu de l’article 25 du règlement (UE) n° 1215/2012 (…) de prévoir dans une convention conclue avant la survenance du litige une clause attributive de compétence pour l’examen de demandes fondées sur le règlement (CE) n° 261/2004 du Parlement européen et du Conseil du 11 février 2004 établissant des règles communes en matière d'indemnisation et d'assistance des passagers en cas de refus d'embarquement et d'annulation ou de retard important d'un vol, et abrogeant le règlement (CEE) n° 295/91.

MOTS CLEFS: 
Convention attributive de juridiction
Contrat de transport
Transport de passagers

CJUE, 18 nov. 2020, Ryanair DAC [c. DelayFix], Aff. C-519/19

Aff. C-579/19

Motif 49 : "Selon l’article 25, paragraphe 1, du règlement n° 1215/2012, les juridictions désignées dans la clause attributive de juridiction sont compétentes, sauf si la validité de la convention attributive de juridiction est entachée de nullité quant au fond, « selon le droit de cet État membre ». Le législateur de l’Union a ainsi introduit la règle selon laquelle la validité d’une clause attributive de juridiction s’apprécie en vertu de la législation de l’État dont les juridictions sont désignées dans cette clause."

Motif 50 : "En l’occurrence, si la juridiction de renvoi examine la validité de la clause attributive de juridiction, il lui appartient, par conséquent, de le faire au regard de la législation de l’État dont les juridictions sont désignées dans cette clause, c’est-à-dire au regard du droit irlandais."

Motif 51 : "Par ailleurs, il incombe à la juridiction saisie d’un litige, tel que celui au principal, d’appliquer la législation de l’État dont les juridictions sont désignées dans ladite clause, en interprétant cette législation conformément au droit de l’Union, et notamment à la directive 93/13 (voir, en ce sens, arrêts du 21 avril 2016, Radlinger et Radlingerová, C‑377/14, EU:C:2016:283, point 79, ainsi que du 17 mai 2018, Karel de Grote – Hogeschool Katholieke Hogeschool Antwerpen, C‑147/16, EU:C:2018:320, point 41)." 

Dispositif (et motif 63) : "L’article 25 du règlement (UE) n° 1215/2012 (…), doit être interprété en ce sens que, pour contester la compétence d’une juridiction pour connaître d’un recours indemnitaire formé sur le fondement du règlement (CE) n° 261/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, établissant des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol, et abrogeant le règlement (CEE) n° 295/91, et dirigé contre une compagnie aérienne, une clause attributive de juridiction insérée dans un contrat de transport conclu entre un passager et cette compagnie aérienne ne peut être opposée par cette dernière à une société de recouvrement à laquelle le passager a cédé sa créance, à moins que, selon la législation de l’État dont les juridictions sont désignées dans cette clause, cette société de recouvrement n’ait succédé au contractant initial dans tous ses droits et obligations, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier. Le cas échéant, une telle clause, qui est insérée sans avoir fait l’objet d’une négociation individuelle dans un contrat conclu entre un consommateur, à savoir le passager aérien, et un professionnel, à savoir ladite compagnie aérienne, et qui confère une compétence exclusive à la juridiction dans le ressort de laquelle le siège de celle-ci est situé, doit être regardée comme abusive, au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs."

Mots-Clefs: 
Convention attributive de juridiction
Tiers
Cession de créance
Droit national
Clauses abusives

CJUE, 8 mars 2018, Saey Home & Garden, Aff. C‑64/17

Aff. C-64/17

Motif 30 : "(…) il est constant, selon la juridiction de renvoi, que l’objet du litige en cause au principal concerne un contrat de concession commerciale pour lequel il est réclamé la réparation du préjudice résultant de la rupture précoce et soudaine, ainsi qu’une indemnité de clientèle pour le non-respect de l’exigence de quasi-exclusivité y afférente. Dès lors, il importe de vérifier, ce qui incombe également à la juridiction de renvoi, que la clause attributive de juridiction en cause au principal concerne ce rapport de droit. En effet, une clause attributive de juridiction insérée dans un contrat ne peut, en principe, produire ses effets que dans les rapports entre les parties qui ont donné leur accord à la conclusion de ce contrat (arrêt du 7 février 2013, Refcomp, point 29)".

Dispositif 1 : "L’article 25, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 (…), doit être interprété en ce sens que, sous réserve des vérifications qu’il incombe à la juridiction de renvoi d’effectuer, une clause attributive de juridiction, telle que celle en cause au principal, stipulée dans des conditions générales de vente mentionnées dans des factures émises par l’une des parties contractantes, ne satisfait pas aux exigences de cette disposition".

Mots-Clefs: 
Convention attributive de juridiction
Concession (contrat)

Civ. 1e, 13 mars 2024, n° 22-24034

Pourvoi n° 22-24034

Motifs : "Enoncé du moyen 

5. La société Sogefi fait grief à l'arrêt de dire que le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence était incompétent pour connaître du litige l'opposant à la banque et de la renvoyer à mieux se pourvoir, alors « que ne répond pas à l'objectif de prévisibilité poursuivi par le règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 la clause attributive de juridiction qui désigne le tribunal appelé à connaître des litiges entre un client et une banque, mais réserve à la banque la faculté d'agir devant tout autre tribunal compétent, sans renvoyer à une règle de compétence déterminée ou à des éléments objectifs suffisamment précis pour identifier la juridiction qui pourrait être saisie ; qu'en retenant néanmoins, pour dire que la clause litigieuse répondait à l'objectif de prévisibilité poursuivi par le règlement précité et refuser de l'écarter, qu'elle ne laissait pas la détermination de la juridiction compétente à la seule discrétion de la banque, mais édictait un critère précis pour permettre la détermination de la juridiction compétente selon la nature du litige pouvant opposer les parties, après avoir pourtant constaté que la clause réservait à la banque la faculté d'agir "devant tout autre tribunal compétent à défaut de l'élection de juridiction qui précède", ce dont il résultait qu'elle ne renvoyait pas à une règle de compétence déterminée ou à des éléments objectifs suffisamment précis pour identifier la juridiction qui pourrait être saisie, la cour d'appel a violé l'article 25 du règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012. 

Réponse de la Cour 

6. Dans une affaire concernant la validité d'une clause attributive de juridiction asymétrique offrant à l'une seulement des parties la possibilité d'opter pour une juridiction de son choix (1re Civ., 13 avril 2023, pourvoi n° 22-12.965), la Cour de cassation a saisi la Cour de justice de l'Union européenne de la question de savoir : (…) 

7. La décision de la Cour de justice de l'Union européenne étant de nature à influer sur la réponse à apporter à la deuxième branche du pourvoi, il y a lieu de surseoir à statuer en son attente."

Mots-Clefs: 
Convention attributive de juridiction
Licéité
Validité (au fond)
Loi applicable
Droit national

Civ. 1e, 13 avr. 2023, n° 22-12965

Pourvoi n° 22-12965

Dispositif : "RENVOIE à la Cour de justice de l'Union européenne les questions suivantes :

1°) En présence d'une clause attributive de juridiction asymétrique offrant à l'une seulement des parties la possibilité d'opter pour une juridiction de son choix, compétente selon les règles de droit commun, autre que celle mentionnée par cette même clause, si l'autre partie soutient que cette clause est illicite en raison de son imprécision et/ou de son caractère déséquilibré, cette question doit-elle être tranchée au regard de règles autonomes tirées de l'article 25, § 1, du règlement Bruxelles I bis et de l'objectif de prévisibilité et de sécurité juridique poursuivi par ce règlement, ou doit-elle être tranchée en faisant application du droit de l'Etat membre désigné par la clause. Autrement dit, cette question relève-t-elle au sens de cet article, de la validité au fond de la clause ? Faut-il au contraire considérer que les conditions de validité au fond de la clause s'interprètent de manière restrictive et ne visent que les seules causes matérielles de nullité, et principalement la fraude, l'erreur, le dol, la violence et l'incapacité ?

2°) Si la question de l'imprécision ou du caractère déséquilibré de la clause doit être tranchée au regard de règles autonomes, l'article 25, § 1, du règlement Bruxelles I bis doit-il être interprété en ce sens qu'une clause qui n'autorise une partie à saisir qu'un seul tribunal, alors qu'elle permet à l'autre de saisir, outre ce tribunal, toute autre juridiction compétente selon le droit commun doit ou ne doit pas recevoir application ?

3°) Si l'asymétrie d'une clause relève d'une condition de fond, comment faut-il interpréter ce texte et particulièrement le renvoi au droit de l'Etat de la juridiction désignée lorsque plusieurs juridictions sont désignées par la clause, ou lorsque la clause désigne une juridiction tout en laissant une option à l'une des parties pour choisir une autre juridiction et que ce choix n'a pas été encore fait au jour où le juge est saisi :

- la loi nationale applicable est-elle celle de la seule juridiction explicitement désignée, peu important que d'autres puissent également être saisies ?

- en présence d'une pluralité de juridictions désignées, est-il possible de se référer au droit de la juridiction effectivement saisie ?

- enfin, eu égard au considérant n° 20 du règlement Bruxelles I bis, faut-il comprendre que le renvoi au droit de la juridiction de l'Etat membre désigné s'entend des règles matérielles de cet Etat ou de ses règles de conflit de lois ?

SURSOIT à statuer sur le pourvoi jusqu'à la décision de la Cour de justice de l'Union européenne ; (…)"

Mots-Clefs: 
Convention attributive de juridiction
Licéité
Validité (au fond)
Loi applicable
Droit national

Civ. 1e, 16 févr. 2022, n° 20-20061

Pourvoi n° 20-20061

Motifs 1: "Selon l'arrêt sur compétence attaqué (Amiens, 7 juillet 2020) la société Opfood product (la société Opfood), dont le siège social est situé à [Localité 3], était liée à la société de droit espagnol Cat Mader par un contrat d'agent commercial comprenant une clause intitulée « compétence juridictionnelle », aux termes de laquelle « Tous les litiges auxquels le présent contrat pourrait donner lieu seront soumis aux tribunaux compétents selon les règles du droit communautaire. Le tribunal du lieu où se trouve le défendeur sera seul compétent »".

Motifs 6 : [après avoir cité le premier alinéa de l'article 25 puis CJCE, 9 novembre 2000, Coreck MaritimeGmbH, C-387/98, motifs 15] "Pour déclarer non écrite la clause attributive de juridiction insérée à l'avenant du 1er février 2017, rejeter l'exception d'incompétence soulevée par la société Cat Mader et décider que le tribunal de commerce de Compiègne est compétent pour connaître du litige, l'arrêt, se référant aux articles 4 et 7 du règlement précité et à l'option de compétence ouverte au demandeur en matière contractuelle, retient qu'il résulte de la première proposition de la clause qu'en application des règles de droit communautaire, la société Opfood bénéficiait d'une option de compétence entre la juridiction du lieu du domicile de la société Cat Mader et celle de son domicile professionnel, en l'occurrence le lieu de son siège social situé à Senlis, de sorte que la seconde proposition, qui ne prime pas sur la première et qui vise la seule compétence du juge du domicile du défendeur, la contredit directement, rendant l'ensemble de la clause contraire au principe de prévisibilité des règles de compétence".

Motifs 7. "En statuant ainsi, en se référant aux règles de conflit applicables en l'absence de clause ou de compétence exclusive et en concluant à une contradiction entre les deux alinéas de la clause qui l'aurait rendue imprévisible, alors qu'en présence d'une clause attributive de compétence, elle devait seulement vérifier, à sa lecture, si cette clause identifiait les éléments objectifs sur lesquels les parties s'étaient mises d'accord pour choisir le tribunal ou les tribunaux auxquels elles entendaient soumettre leurs différends nés ou à naître, la cour d'appel a violé le texte susvisé".

Civ. 1e, 11 juil. 2019, n° 18-11456

Pourvoi n° 18-11456

Motifs : "Mais attendu que l'arrêt énonce qu'aux termes de l'article 21 du contrat-cadre régissant leurs relations, le vendeur et le constructeur sont convenus que tous les litiges découlant du contrat ou en rapport avec lui et des contrats de vente conclus au cours de son exécution relèveraient de la compétence exclusive des tribunaux de Passau (Allemagne), le fournisseur étant, toutefois, également en droit d'introduire une action contre le revendeur devant le tribunal du siège social de celui-ci ; qu'en l'état de ces constatations, dont il ressortait que les juridictions pouvant être saisies étaient précisément identifiées, de sorte que la clause attributive de juridiction répondait à l'objectif de prévisibilité poursuivi par le règlement (UE) n° 1215/2012 (…), la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision".

Mots-Clefs: 
Convention attributive de juridiction
Licéité

CCIP-CA, 3 juin 2020, RG n° 19/20734

RG n° 19/20734

Motifs : "33. La clause attributive de juridiction figure par écrit à l’article 13 du contrat d’abonnement qui prévoit l’application de la loi anglaise et la compétence exclusive des tribunaux d’Angleterre lorsque le cocontractant de Salesforce.com a son domicile dans « un pays d’Europe, du Moyen-Orient ou en Afrique ». L’article 13.3 précise que chaque partie consent (…) à la compétence exclusive des juridictions ainsi fixée (« each party agrees to the applicable governing law above without regard to choice or conflicts of law rules, and to the exclusive jurisdiction of the applicable courts above »).

34. Selon l’article 25 du règlement [Bruxelles I bis], la validité au fond de ladite clause ne peut être contestée qu’au regard du seul droit anglais, droit de l’Etat membre visé par la clause attributive de juridiction, et non au regard du droit français, comme le soutient à tort la société Lamirault. Sa contestation de la clause sur le fondement de l’article 48 du code de procédure civile français n’est dès lors pas justifiée". 

Mots-Clefs: 
Convention attributive de juridiction
Validité (au fond)
Droit national

CCIP-CA, 7 janv. 2020, n° 19/12209

RG n° 19/12209

Motifs : [Dans les motifs précédents, la Cour a justifié l’application du règlement Bruxelles I bis et cité l’arrêt CDC de la Cour de justice ; aux motifs 38 et 39, elle cite également l’arrêt Apple Sales International, également de la Cour de justice]  

"36. En l'espèce, il est constant qu'aux termes de son assignation initiale, la société Sport One [de droit français] a sollicité à titre principal la nullité de la décision de la société NEON [filiale néerlandaise de Nike] de rompre les relations commerciales en ce que cette décision est motivée par une pratique anticoncurrentielle caractérisée par une restriction verticale de concurrence et à titre subsidiaire le caractère brutal de la rupture des relations commerciales établies entre les sociétés depuis presque 10 ans.

Sur la compétence du tribunal de commerce de Paris pour connaître de l'atteinte au droit de la concurrence ; (…)

40. Il se déduit de ces deux décisions [CDC et Apple Sales International] de la Cour de Justice de l'Union européenne que l'application d'une clause attributive de juridiction dans le cadre d'une action en responsabilité fondée sur des pratiques anticoncurrentielles varie, non pas en fonction de la nature du comportement allégué, mais en considération du lien qui existe entre ce comportement et le contrat contenant la clause attributive de juridiction. (…)

44. Il ressort de ces éléments que dans le cadre du présent litige, la demande principale de la société Sport One porte expressément sur l'appréciation au regard des règles de droit de la concurrence de la licéité de la clause 9.4 des conditions générales de vente, lesquelles contiennent aussi la clause attributive de juridiction litigieuse, rédigée comme suit :

« Article 12 – Droit applicable et compétence juridictionnelle

12.1 Toute commande sera considérée comme un contrat conclu aux Pays-Bas et soumise à tous égards au droit néerlandais, y compris la Convention sur la loi applicable aux contrats de vente internationale de marchandises.

12.2 L’Acheteur se soumet irrévocablement à la compétence des juridictions d’Amsterdam (Pays-Bas) pour toute action en justice ou procédure judiciaire liée à une Commande et/ou aux présentes Conditions.

12.3 Conçue en faveur de NIKE, la clause 12.2 ne saurait affecter le droit pour celle-ci d’agir devant toute autre juridiction ».

45. S'il est vrai que cette clause vise « toute action en justice ou procédure judiciaire liée à une Commande » et que l'article 1.2 de ces mêmes conditions générales précise que « Chaque Commande acceptée constituera (…) un accord autonome conclu entre NIKE et l'Acheteur », cette même clause indique aussi qu'elle a vocation à s'appliquer cumulativement ou alternativement (« et/ou ») « aux présentes Conditions », de sorte qu'elle couvre aussi toute action portant sur les conditions générales de vente, et notamment l'article 9.4 dont la société Sport One soutient l'illicéité pour justifier la nullité de la décision par laquelle la société NEON a mis fin à la relation commerciale.

46. En outre, l'article 13 de ces mêmes conditions générales de vente porte également sur les « règles applicables en matière de distribution sélective » et dispose que « l'Acheteur se conformera à tout moment aux règles de NIKE applicables en matière de distribution sélective (...) ».

47. Ainsi la demande principale relative à la nullité de la décision du 18 mai 2015 étant fondée par la société Sport One sur l'illicéité alléguée de l'article 9.4 des conditions générales de vente au regard des règles sur le droit de la concurrence, il y a lieu de considérer que le comportement anticoncurrentiel allégué est en lien avec ces conditions générales de vente contenant la clause attributive de juridiction et que les pratiques dénoncées ne sont manifestement pas étrangères au rapport contractuel dans le cadre duquel la clause attributive de juridiction a été conclue.

48. En conséquence, la société Sport One n'est pas fondée à considérer que la clause attributive de juridiction insérée dans ces conditions générales n'a pas vocation à s'appliquer pour déterminer la juridiction compétente.

49. Il convient dans ces conditions de confirmer de ce chef le jugement du tribunal de commerce de Paris.

Sur la compétence du tribunal de commerce pour connaître de la demande de réparation fondée sur la rupture brutale des relations commerciales ;

50. Il convient de rappeler que l'article 25 du Règlement Bruxelles I bis précité ne limite nullement la portée d'une clause attributive de juridiction aux seuls différends de nature contractuelle mais vise plus précisément la faculté pour les parties de choisir la juridiction compétente « pour connaître des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé ».

51. Dès lors, l'application d'une telle clause ne dépend pas de la nature contractuelle ou délictuelle de l'action en responsabilité diligentée mais de la seule portée que les parties ont voulu donner à cette clause.

52. Il appartient donc à la cour d'apprécier en l'espèce si la clause litigieuse est rédigée en termes suffisamment larges pour englober l'action diligentée par la société Sport One en réparation du préjudice du fait de la rupture alléguée comme brutale des relations commerciales nouées avec la société NEON.

53. A cet égard, ainsi qu'il l'a été mentionné ci-dessus, si la clause litigieuse ne vise pas expressément ce type d'action, ses termes sont toutefois suffisamment généraux pour l'englober dès lors qu'elle se réfère non seulement à « toute action en justice ou procédure judiciaire liée à une Commande » mais aussi à toute action ou procédure judiciaire liée « aux présentes Conditions », à savoir aux conditions générales de vente, auxquelles, d'une part, l'article 4 du document relatif à la politique de distribution de la société NEON renvoie expressément, et dont, d'autre part, certains articles ont un champ qui dépasse manifestement celui de la commande isolée et régissent les relations commerciales entre les parties.

54. Ainsi, l'article 9 intitulé « droits de propriété intellectuelle » dispose que « Nike se réserve tous les droits et objets de droits de propriété intellectuelle relatifs à ses produits (…). L'acheteur s'interdit d'utiliser ces droits et objets de droits de propriété intellectuelle, de les enregistrer ou de les mettre à la disposition d'un tiers sans l'accord écrit exprès et préalable de Nike (…) » et interdit notamment l'acheteur d'utiliser « une marque Nike sur un site internet sans l'accord écrit préalable de Nike ».

55. Tel est le cas aussi de l'article 10 intitulé « Confidentialité » au terme duquel « Nike et l'acheteur tiendront confidentielles et s'abstiendront de communiquer à un tiers, sans l'accord écrit préalable de l'autre partie, des informations techniques ou commerciales acquises de l'autre partie par suite de discussions, de négociations et d'autres communications entre eux se rapportant aux produits ou à la commande ».

56. Tel est le cas enfin de l'article 13 intitulé « règles applicables en matière de distribution sélective » selon lequel « l'Acheteur se conformera à tout moment aux règles de NIKE applicables en matière de distribution sélective (...) ».

57. Il ressort de ces articles, insérés dans les conditions générales de vente, que celles-ci n'ont manifestement pas pour seul objet de régir chacune des commandes prises isolément, mais aussi les « discussions », « négociations » et autres « communications entre eux se rapportant aux produits » en général ou encore aux règles de Nike «applicables en matière de distribution sélective », autant de points qui ont trait aux relations commerciales établies entre les parties.

58. En l'état de ces éléments, il convient de considérer que la clause attributive de juridiction peut englober une action en réparation liée à la rupture des dites relations commerciales de sorte que seules les juridictions d’Amsterdam (Pays-Bas) désignées par cette clause sont compétentes pour en connaître et que le jugement du tribunal de commerce de Paris qui s'est déclaré incompétent doit être dès lors confirmé.".

Official English Abstract:

"In an action for compensation brought by Sport One, a company incorporated under French law, against Nike Europe Operations Netherlands (Neon), a company incorporated under Dutch law,  relating to the allegation of vertical restraint on competition and  to the brutal nature of the termination of the commercial relationships established between the companies for almost 10 years, the ICCP-CA confirmed the ruling of the Paris Commercial Court which ruled out its jurisdiction to hear the dispute on the ground  of the jurisdiction clause designating the courts of the Netherlands inserted in the general terms and conditions of sale concluded on the occasion of the purchases by the French company of the Dutch company's products.

The court held in view of the case law of the ECJ (judgments of May 21, 2015, CDC Hydrogen Peroxide, C - 352/13 and of October 24, 2018, Apples Sales Vs eBizcuss.com C-595/17), that the application of a jurisdiction clause in the context of claim based on anticompetitive practices varies, not according to the nature of the alleged behavior, but according to the link between this behavior and the contract containing the jurisdiction clause. Holding that the anticompetitive practices in which the Dutch company had engaged had materialized in the contractual relations established between the parties, by means of the contractual conditions agreed so that the practices denounced were clearly not unrelated to the contractual relationship in the context of which the jurisdiction clause was concluded, the court ruled that the jurisdiction clause inserted in these general terms and conditions was  deemed to apply to rule on the jurisdiction. 

Regarding the jurisdiction of the Paris Commercial Court to hear the claim for compensation based on the abrupt termination of the commercial relationships, the ICCP-CA held that article 25 of the Brussels I (recast) Regulation in no way limits the scope of a jurisdiction clause attributive to disputes of a contractual nature but more specifically relates to the possibility for the parties to choose the competent jurisdiction "to hear disputes arising or to arise on the occasion of a specific legal relationship" and that the application of such a clause does not depend on the contractual or tortious nature of the claim but on the only scope which the parties wanted to give to this clause. Considering in the present case that the clause at issue was drafted in sufficiently broad terms to encompass the action brought by the French company in compensation for the damage caused by the alleged abrupt termination of the commercial relationships established with the Dutch company, the court  held that only the courts of Amsterdam (Netherlands) designated by this have jurisdiction to hear this case.".

Mots-Clefs: 
Convention attributive de juridiction
Droit de la concurrence

CCIP-CA, 4 juill. 2019, RG n° 19/08038

RG n° 19/08038

Motif 29 : "En l'état de ce contrat de distribution non exclusive conclu entre les parties quatre ans avant la rupture des relations et régissant les rapports entre celles-ci depuis 2013, il convient de considérer que l'action en réparation des préjudices subis du fait de la prétendue rupture brutale des relations commerciales établies est un différend né de la relation des parties et à ce titre, se rattache à la matière contractuelle et que ce faisant les demandes fondées sur les articles L. 442-6, I , 5° du code de commerce relèvent donc de la clause attributive de juridiction susvisée."

Motif 30 : "De même, à l'instar de ce qui a été jugé par la Cour de justice de l'Union européenne le 24 octobre 2018 (CJUE C-595/17 – affaire Apple Sale International c. MJA), l'application d'une clause attributive de juridiction contenue dans un contrat liant les parties n'est pas exclue à l'égard d'une action en dommages et intérêts intentée par un distributeur à l'encontre de son fournisseur sur le fondement des articles L. 420-1 du code de commerce et de l'article 102 TFUE, au seul motif que cette clause ne se réfère pas expressément aux différends relatifs à la responsabilité encourue du fait d'une infraction au droit de la concurrence."

Motif 31 : "En l'espèce, il convient d'observer d'une part, que l'action tendant à voir caractérisé l'abus de position dominante allégué par la société Anju se matérialise dans la relation contractuelle que la société Unilever a nouée avec celle-là dans un premier temps sans contrat de distribution puis à partir du 3 juin 2013 au moyen du contrat de distribution non exclusive conclu entre les parties".

Motif 32 : "D'autre part, en visant expressément les litiges qui « soient de nature contractuelle ou non, telle que des réclamations en responsabilité civile délictuelle pour violation d'une loi, d'un règlement ou autre », la clause litigieuse est suffisamment précise pour englober les actions en réparation de comportements anticoncurrentiels, tels que l'abus de position dominante."

Mots-Clefs: 
Convention attributive de juridiction
Droit de la concurrence
Licéité

CCIP-CA, 4 juill. 2019, RG n° 19/08038

RG n° 19/08038

"Sur la validité de la clause attributive de juridiction au regard du droit anglais ;"

Motif 34 : "Il ressort de l'article 25.1 du règlement n°1215/2012 précité que la compétence de la juridiction d'un État membre désignée par la clause attributive de compétence s'impose sauf si la validité de la convention attributive de juridiction est entachée de nullité quant au fond selon le droit de cet État membre."

Motif 35 : "Il appartient en conséquence à la cour d'apprécier la validité, quand au fond, de la clause attributive de juridiction au regard en l'espèce du droit anglais dont la société Anju soutient qu'il doit conduire à prononcer la nullité de la clause sur le fondement de la doctrine tant de la contrainte économique (« economic duress ») que de l'influence indue (« undue influence »)."

Mots-Clefs: 
Convention attributive de juridiction
Validité (au fond)
Droit de la concurrence

CCIP-CA, 12 févr. 2019, n° 18/21818

RG n° 18/21818

Motif 42 : « Il est constant que la société Interbulk avait prévu d'associer la société Tercim au projet et que cette société est mentionnée dans le contrat pour acter sa participation à certaines étapes du projet auquel elle a effectivement pris part dans l'acquisition du terrain et la constitution de la société d'exploitation de la cimenterie. »

Motif 43 : « Toutefois la société Tercim n'a pas signé le contrat écrit qui a été convenu entre la société Consar et la société Interbulk et aucune pièce ne révèle qu'elle a donné son consentement effectif à l'égard de cette clause dans les conditions formelles de l'article 25 du règlement n°1215/2012. »

Motif 44 : « Il s'ensuit que la clause attributive de compétence convenue dans le contrat conclu entre la société Consar et la société Interbulk est inopposable à la société Tercim de sorte que cette clause ne peut servir de fondement à la compétence du tribunal de commerce de Paris à l'égard de la société Tercim et qu'il y a lieu de déterminer cette compétence en application des règles générales du règlement n°1215/2012 et notamment de l'article 4.1 précité qui donne compétence à la juridiction française [l'ordre juridique français, motif 45], comme étant celle de l'Etat dans lequel la société Tercim a son siège social. »

Mots-Clefs: 
Convention attributive de juridiction
Tiers
Consentement
Imprimé depuis Lynxlex.com

Source URL:https://www.lynxlex.com/en/node/4111