Centre des intérêts principaux

CJUE, 16 juil. 2020, MH et NI c. Novo Banco, Aff. C-253/19

Aff. C-253/19, concl. M. Szpunar

Motif 23 : "Troisièmement, il découle des termes mêmes de l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement 2015/848 que les considérations qui précèdent valent indistinctement pour tout débiteur, qu’il s’agisse de sociétés, de personnes morales ou de personnes physiques. Ce critère général de rattachement pour déterminer la compétence internationale aux fins de l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité ainsi que l’approche fondée sur des critères objectifs et vérifiables par les tiers qu’il convient d’adopter pour l’appliquer valent donc a fortiori pour les personnes physiques n’exerçant pas de profession libérale ou toute autre activité d’indépendant".

Motif 24 : "Cela étant, il y a lieu de préciser, ainsi que l’a relevé, en substance, M. l’avocat général aux points 45 et 49 de ses conclusions, que les critères pertinents pour déterminer le centre des intérêts principaux d’une personne physique n’exerçant pas une profession libérale ou toute autre activité d’indépendant sont ceux qui se rapportent à sa situation patrimoniale et économique, ce qui correspond au lieu où cette personne gère ses intérêts économiques et où la majorité de ses revenus sont perçus et dépensés, ou bien au lieu où se situe la majeure partie de ses actifs".

Motif 26 : "Toutefois, l’article 3, paragraphe 1, quatrième alinéa, du règlement 2015/848 prévoit que cette présomption [de la résidence habituelle] ne vaut que jusqu’à preuve du contraire, et le considérant 30 de ce règlement précise qu’il devrait être possible de renverser ladite présomption, par exemple si la majeure partie des actifs du débiteur est située en dehors de l’État membre de sa résidence habituelle, ou s’il peut être établi que le principal motif de son déménagement était d’ouvrir une procédure d’insolvabilité auprès de la nouvelle juridiction et si l’ouverture de cette procédure risque de nuire sérieusement aux intérêts des créanciers dont les relations avec le débiteur ont débuté avant le déménagement".

Motif 27 : "Il reste, comme l’a relevé M. l’avocat général au point 55 de ses conclusions, que le seul fait que des circonstances mentionnées à ce considérant sont réunies ne sauraient suffire à renverser la présomption énoncée à l’article 3, paragraphe 1, quatrième alinéa, du règlement 2015/848".

Motif 30 : "À cet égard, si la cause de la situation d’insolvabilité n’est pas, en tant que telle, un élément pertinent pour déterminer le centre des intérêts principaux d’une personne physique n’exerçant pas une profession libérale ou toute autre activité d’indépendant, il revient néanmoins à la juridiction de renvoi de prendre en considération l’ensemble des éléments objectifs et vérifiables par les tiers qui se rapportent à sa situation patrimoniale et économique. Dans un cas tel que celui en cause au principal, ainsi qu’il a été rappelé au point 24 du présent arrêt, cette situation est localisée au lieu où les requérants au principal gèrent habituellement leurs intérêts économiques et où la majorité de leurs revenus sont perçus ou dépensés, ou bien au lieu où se situe la majeure partie de leurs actifs".

Dispositif (et motif 31) : "L’article 3, paragraphe 1, premier et quatrième alinéas, du règlement (UE) 2015/848 du Parlement européen et du Conseil, du 20 mai 2015, relatif aux procédures d’insolvabilité, doit être interprété en ce sens que la présomption qu’il prévoit pour déterminer la compétence internationale aux fins de l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité, selon laquelle le centre des intérêts principaux d’une personne physique n’exerçant pas une profession libérale ou toute autre activité d’indépendant est sa résidence habituelle, n’est pas renversée du seul fait que l’unique bien immobilier de cette personne est situé en dehors de l’État membre de résidence habituelle".

Insolvabilité bis (règl. 2015/848)

CJUE, 24 mai 2016, Leonmobili, Aff. C-353/15 [Ordonnance]

Dispositif : "L’article 3, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1346/2000 (…) doit être interprété en ce sens que, dans la circonstance où le siège statutaire d’une société a été transféré d’un État membre vers un autre État membre, la juridiction, saisie ultérieurement audit transfert, d’une demande d’ouverture d’une procédure d’insolvabilité dans l’État membre d’origine ne peut écarter la présomption selon laquelle le centre des intérêts principaux de cette société est situé au lieu du nouveau siège statutaire et considérer que le centre de ces intérêts demeurait, à la date à laquelle elle a été saisie, dans cet État membre d’origine, bien que cette société n’y eût plus d’établissement, que s’il résulte d’autres éléments objectifs et vérifiables par les tiers que, néanmoins, le centre effectif de direction et de contrôle de ladite société ainsi que de la gestion de ses intérêts s’y trouvait encore à cette date".

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

CJUE, 4 sept. 2014, Burgo Group, Aff. C-327/13

Dispositif 1 (et motif 39) : "L’article 3, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1346/2000 (…), doit être interprété en ce sens que, dans le cadre de la mise en liquidation d’une société dans un État membre autre que celui dans lequel elle a son siège social, cette société peut également faire l’objet d’une procédure secondaire d’insolvabilité dans l’autre État membre, où elle a son siège social et où elle est dotée d’une personnalité juridique". 

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

Com., 27 mai 2014, n° 13-14425

Motif : "Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant constaté, par motifs adoptés, que ce n'est qu'après l'ouverture de la procédure collective que M. X... avait adressé au liquidateur un état détaillé de son passif mentionnant plusieurs créances de l'administration fiscale allemande, puis relevé qu'en dissimulant intentionnellement ce passif fiscal, majoritaire et composé de la taxe sur la valeur ajoutée et de l'impôt sur le revenu à raison d'une activité économique exercée en Allemagne, M. X... avait voulu éviter une discussion sur le centre de ses intérêts principaux et de son activité en France pour bénéficier du droit français des procédures collectives, la cour d'appel a caractérisé la fraude au sens de l'article L. 643-11 IV du code de commerce

Attendu, en deuxième lieu, qu'en retenant que la localisation du centre des intérêts principaux en France était contestable, la cour d'appel, abstraction faite du motif critiqué par la troisième branche, n'a pas remis en cause l'autorité de chose jugée attachée au jugement d'ouverture de la procédure collective ; 

Attendu, en troisième lieu, que l'autorisation de reprise des actions individuelles qui doit être donnée en cas de fraude, par application d'une règle de droit français, n'étant pas subordonnée à l'exercice éventuel d'un recours en révision contre le jugement ouvrant la procédure collective, la critique de la quatrième branche est inopérante ;

Attendu, en dernier lieu, qu'après avoir retenu que le passif réel démontrait l'exercice d'une activité économique en Allemagne, l'arrêt relève que l'administration fiscale allemande avait adressé, dès le mois de juin 2008, plusieurs mises en demeure à M. X... et que ce dernier, contribuable exerçant une activité économique, se savait nécessairement redevable de la taxe sur la valeur ajoutée et de l'impôt sur le revenu réalisé dans le cadre de cette activité ; qu'en l'état de ces appréciations, dont il résultait que M. X... n'ignorait pas, au moment de sa demande d'ouverture de la procédure collective, que la localisation en France du centre de ses intérêts principaux était contestable, la cour d'appel, sans encourir le grief de la huitième branche, a, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les cinquième et sixième branches, légalement justifié sa décision…".

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

Com, 27 mai 2014, n° 13-14956

Motif : "(…) en présence d'une décision ayant ouvert la procédure principale d'insolvabilité dans un État membre de l'Union européenne et d'une instance en cours devant une juridiction d'un autre État membre en vue de l'ouverture d'une procédure identique à l'égard du même débiteur, le conflit se résout en faveur de la décision d'ouverture déjà intervenue qui doit être internationalement reconnue, et non en fonction des dates respectives de saisine des juridictions ou par application de la loi désignée par l'article 15 du règlement [n° 1346/2000], lequel, ne concernant que les instances relatives à un bien ou un droit dont le débiteur est dessaisi, ne vise pas l'instance en ouverture de la procédure ; qu'ayant constaté qu'une juridiction de Cologne avait ouvert le 6 novembre 2008 la procédure principale d'insolvabilité de M. X... tandis que la demande présentée par celui-ci au tribunal de grande instance de Sarreguemines était en cours d'examen, la cour d'appel, à qui il était interdit d'effectuer la recherche évoquée par la première branche [i.e. déterminer si le centre des intérêts principaux du débiteur se trouvait en France] ou d'appliquer les règles françaises sur la litispendance internationale, en a déduit à bon droit que la procédure principale d'insolvabilité ne pouvait plus être ouverte en France".

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

CA Riom, 10 sept. 2008, n° 06/01086

RG n° 06/01086

Motif : "Attendu que le présent litige porte sur l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire en France d'une société de droit luxembourgeois en application du règlement (CE) n° 1346 / 2000 (...) ;

Que l'article 3.1 énonce que 'Les juridictions de l'Etat membre sur le territoire duquel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur sont compétentes pour ouvrir la procédure d'insolvabilité. Pour les sociétés et personnes morales, le centre des intérêts principaux est présumé, jusqu'à preuve contraire, être le lieu du siège statutaire' ; Que la notion de 'centre des intérêts principaux' est définie par le règlement comme devant 'correspondre au lieu où le débiteur gère habituellement ses intérêts et qui est donc vérifiable par les tiers';

Que le règlement fait donc primer le principe de réalité en faisant du siège statutaire une simple présomption laissant au tribunal saisi le pouvoir de vérifier la localisation effective du centre des intérêts principaux déterminant les règles de compétence et par suite la législation applicable ;

Attendu en l'espèce qu'il est constant que la SA PRO-TECH, créée le 1er août 2001, a fait l'objet d'une immatriculation au registre du commerce de Luxembourg le 27 août 2001 puis d'un changement de son siège social, toujours à Luxembourg mais au [...], publié le 13 novembre 2001 ;

Qu'il est établi par les pièces produites par Monsieur l'Inspecteur Départemental des Impôts qu'elle exerçait en fait son activité illicite de vente de détecteurs de radars dans les locaux de la société ACCORD sis [...], laquelle lui fournissait également le matériel de bureau et le matériel informatique moyennant rémunération, tel que cela résulte des documents comptables et commerciaux saisis, de l'ouverture par son dirigeant de fait, M. B., de deux comptes bancaires utilisés pour encaisser les recettes, et de sa signature du contrat COLIPOSTE destiné à l'exploitation des marchandises ; Que par contre les renseignements obtenus au Luxembourg démontrent que M. B. était inconnu des administrations fiscales et sociales de ce pays, que la SA PRO-TECH a déclaré aux services fiscaux luxembourgeois n'avoir réalisé aucun chiffre d'affaires en 2001 et qu'à la fin du mois d'octobre 2002, elle n'avait souscrit aucune déclaration bien qu'elle soit soumise au régime trimestriel ;

Qu'il doit être déduit de ces éléments que la fixation officielle au Luxembourg du siège social de la SA PRO-TECH constitue une opération fictive de nature à masquer une activité effective en France avec un établissement stable à CLERMONT-FERRAND ; Que le fait que cet établissement, non détenteur de la personnalité morale, n'ait pas été immatriculé n'enlève rien au fait qu'il constituait en réalité le centre des intérêts principaux de la SA PRO-TECH ;

Attendu qu'il s'ensuit que le tribunal de commerce de CLERMONT-FERRAND avait bien compétence pour être saisi en ouverture d'une procédure dite 'principale' de liquidation judiciaire et qu'il convient en conséquence d'appliquer la loi française tel que prévu par l'article 4 du règlement". 

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

C. trav. Bruxelles (12ème ch.), 17 mai 2011, n° 2011/1442

Motif : "Pour les sociétés et les personnes morales, le règlement présume, jusqu’à preuve du contraire, que le centre des intérêts principaux est le lieu du siège statutaire (Règlement, art. 3.1). Par contre, pour le débiteur personne physique, le règlement ne contient pas de présomption ; en particulier, il ne présume pas que le centre des intérêts principaux du débiteur personne physique est situé à son domicile ou à sa résidence principale. A l’égard des personnes physiques, l’interprétation selon laquelle le domicile ou la résidence principale détermine, jusqu’à preuve contraire, le centre des intérêts principaux au sens de l’article 3.1 du Règlement CE relatif aux procédures d’insolvabilité ne peut pas être suivie. Cette interprétation ne résulte ni du texte du Règlement, ni des considérants qui le précèdent. Même si Madame Ch.H. est domiciliée en Belgique, les juridictions belges ne sont compétentes pour l’admettre à la procédure en règlement collectif de dettes que s’il résulte des circonstances de l’espèce que le centre de ses intérêts principaux se situe en Belgique".

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

T. com. Nevers, 22 mars 2013

Motif : "conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, une procédure de redressement judiciaire peut être étendue sur le fondement de la confusion des patrimoines ou de la fictivité de la personne morale, à une autre personne morale domiciliée à l’étranger dès lors que deux critères cumulatifs sont établis :

– des éléments objectifs et vérifiables devant permettre d’établir l’existence d’un centre des intérêts principaux différent du siège statutaire ; et

– une appréciation globale de l’ensemble des éléments pertinents devant permettre d’établir que le centre de direction et de contrôle de la société est différent du siège statutaire.

(…) Qu’il convient, selon une jurisprudence européenne désormais bien établie, de s’appuyer sur des éléments objectifs et vérifiables par les tiers permettant de prouver l’existence d’une situation réelle différente de celle que la localisation audit siège statutaire est censée refléter

Qu’un faisceau d’indices concordants et vérifiables par les tiers démontre que le centre des intérêts principaux de l’entité « Beltank » est en France et plus particulièrement à Nevers [lieu de la direction stratégique et opérationnelle des différentes entités connues aux yeux des tiers sous le nom "Beltank", identité de l'actionnaire majoritaire, domicile des salariés, domicile des clients, lieu des livraisons, lieu d'exploitation et d'assurance des bateaux, lieu des négociations commerciales avec le principal client…]".

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

Com., 5 juin 2012, n° 11-22466

Motif : "[Viole l’article 3.1 du règl. CE n° 1346/2000 le président d’une cour d’appel dont] l'ordonnance retient que l'exception d'incompétence et l'irrecevabilité de l'action aux fins d'extension [d’une procédure de liquidation ouverte en France] soulevées par [une société dont le siège statutaire est au Luxembourg] (…) ont déjà été écartées en première instance par des motifs, tirés de la simple lecture d'un jugement correctionnel, dont il appartient à la seule cour d'appel saisie au fond d'examiner le bien-fondé, [alors qu’il aurait dû] apprécier le caractère sérieux du moyen invoqué par la [requérante] à l'appui de son appel".

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

Com., 10 mai 2012, n° 09-12642

Motif : "en se déterminant [pour fonder sa compétence] par [d]es motifs inopérants, sans rechercher si le centre des intérêts principaux de la société Rastelli se trouvait situé sur le territoire français, ce qu'elle ne pouvait déduire de la seule constatation de la confusion de son patrimoine avec celui de la société Médiasucre, mais exclusivement d'une appréciation globale de l'ensemble des éléments pertinents permettant d'établir que, de manière vérifiable par les tiers, le centre effectif de direction et de contrôle de la société Rastelli se situait en France et non au lieu de son siège statutaire en Italie, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision".

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

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