Appel en garantie

Civ. 1e, 13 mai 2020, n° 18-25754

Motifs :

"Enoncé du moyen

8. La société HanseYachts fait le même grief à l'arrêt [d'avoir retenu la compétence du tribunal de commerce de Cannes], alors « qu'en toute hypothèse, suivant l'article 5. 1) du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, une personne domiciliée sur le territoire d'un État membre peut être attraite, dans un autre État membre, en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée, à savoir, pour la vente de marchandises, le lieu d'un État membre où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées ; qu'il résulte de cette disposition, invoquée par la société HanseYachts que le navire ayant été livré en son siège de Greifswald, en Allemagne, ce que la cour d'appel a elle-même constaté, le tribunal de commerce de Cannes, la livraison du navire n'étant pas localisée en France, était incompétent pour statuer sur l'action formée à l'encontre de la société HanseYachts par la société Firros ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé les articles 2.1, 3.1 et 5.1) du règlement du 22 décembre 2000 ».

Réponse de la Cour

9. Ayant constaté que la clause attributive de juridiction dont se prévalait le constructeur était inapplicable et qu'elle était saisie par le vendeur d'un appel en garantie, la cour d'appel en a exactement déduit, en l'absence de contestation du lien existant entre la demande originaire et la demande en garantie, qu'elle était compétente à l'égard du constructeur, en application de l'article 6, point 2, du règlement n° 44/2001 (…)".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

Article 8.2 [Appel en garantie et en intervention]

Une personne domiciliée sur le territoire d’un État membre peut aussi être attraite :

(…)

Bruxelles I (règl. 44/2001)
Bruxelles I bis (règl. 1215/2012)

CJUE, 31 janv. 2018, Paweł Hofsoe, Aff. C-106/17

Motif 44 : "Si, certes, ainsi que le précise le considérant 18 du règlement n° 1215/2012, l’objectif de la section 3 du chapitre II de ce règlement est de protéger la partie la plus faible au moyen de règles de compétence plus favorables à ses intérêts que ne le sont les règles générales, il apparaît que la demande en cause au principal s’inscrit dans des rapports entre professionnels et qu’elle n’est pas de nature à affecter la situation procédurale d’une partie réputée plus faible (voir, en ce sens, arrêt du 21 janvier 2016, SOVAG, C‑521/14, EU:C:2016:41, points 29 et 30)".

Motif 45 : "À cet égard, la circonstance qu’un professionnel, tel que [le cessionnaire], exerce son activité dans le cadre d’une petite structure ne saurait mener à considérer qu’il s’agit d’une partie réputée plus faible que l’assureur. En effet, une appréciation au cas par cas de la question de savoir si un tel professionnel peut être considéré comme une « partie plus faible » afin de pouvoir relever de la notion de « personne lésée », au sens de l’article 13, paragraphe 2, du règlement n° 1512/2012, ferait naître un risque d’insécurité juridique et irait à l’encontre de l’objectif dudit règlement, énoncé au considérant 15 de celui-ci, selon lequel les règles de compétence doivent présenter un haut degré de prévisibilité (voir, en ce sens, arrêt du 20 juillet 2017, MMA IARD, C‑340/16, EU:C:2017:576, point 34)".

Dispositif : "L’article 13, paragraphe 2, du règlement (UE) n° 1215/2012 (…), lu en combinaison avec l’article 11, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, doit être interprété en ce sens qu’il ne peut pas être invoqué par une personne physique, dont l’activité professionnelle consiste, notamment, à recouvrer des créances d’indemnisation auprès des assureurs et qui se prévaut d’un contrat de cession de créance conclu avec la victime d’un accident de circulation pour assigner l’assureur en responsabilité civile de l’auteur de cet accident, qui a son siège dans un État membre autre que l’État membre du domicile de la personne lésée, devant une juridiction de ce dernier État membre".

Bruxelles I bis (règl. 1215/2012)

CJUE, 31 janv. 2018, Paweł Hofsoe, Aff. C-106/17

Motif 44 : "Si, certes, ainsi que le précise le considérant 18 du règlement n° 1215/2012, l’objectif de la section 3 du chapitre II de ce règlement est de protéger la partie la plus faible au moyen de règles de compétence plus favorables à ses intérêts que ne le sont les règles générales, il apparaît que la demande en cause au principal s’inscrit dans des rapports entre professionnels et qu’elle n’est pas de nature à affecter la situation procédurale d’une partie réputée plus faible (voir, en ce sens, arrêt du 21 janvier 2016, SOVAG, C‑521/14, EU:C:2016:41, points 29 et 30)".

Motif 45 : "À cet égard, la circonstance qu’un professionnel, tel que [le cessionnaire], exerce son activité dans le cadre d’une petite structure ne saurait mener à considérer qu’il s’agit d’une partie réputée plus faible que l’assureur. En effet, une appréciation au cas par cas de la question de savoir si un tel professionnel peut être considéré comme une « partie plus faible » afin de pouvoir relever de la notion de « personne lésée », au sens de l’article 13, paragraphe 2, du règlement n° 1512/2012, ferait naître un risque d’insécurité juridique et irait à l’encontre de l’objectif dudit règlement, énoncé au considérant 15 de celui-ci, selon lequel les règles de compétence doivent présenter un haut degré de prévisibilité (voir, en ce sens, arrêt du 20 juillet 2017, MMA IARD, C‑340/16, EU:C:2017:576, point 34)".

Dispositif : "L’article 13, paragraphe 2, du règlement (UE) n° 1215/2012 (…), lu en combinaison avec l’article 11, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, doit être interprété en ce sens qu’il ne peut pas être invoqué par une personne physique, dont l’activité professionnelle consiste, notamment, à recouvrer des créances d’indemnisation auprès des assureurs et qui se prévaut d’un contrat de cession de créance conclu avec la victime d’un accident de circulation pour assigner l’assureur en responsabilité civile de l’auteur de cet accident, qui a son siège dans un État membre autre que l’État membre du domicile de la personne lésée, devant une juridiction de ce dernier État membre".

Bruxelles I bis (règl. 1215/2012)

CJUE, 21 janv. 2016, SOVAG, Aff. C-521/14

Motif 30 : "(…) la demande en cause au principal s’inscrit dans des rapports entre professionnels du secteur des assurances et n’est pas susceptible d’affecter la situation procédurale d’une partie réputée plus faible. L’objectif de protéger cette dernière étant acquis une fois établie la compétence en vertu de la section 3 du chapitre II du règlement n° 44/2001, des développements procéduraux ultérieurs concernant les seuls rapports entre professionnels ne sauraient relever du champ d’application de cette section (voir, en ce sens, arrêts GIE Réunion européenne e.a., C‑77/04, EU:C:2005:327, points 20 et 23, ainsi que Vorarlberger Gebietskrankenkasse, C‑347/08, EU:C:2009:561, point 42)".

Motif 31 : "Dès lors, une demande qui, comme celle en cause au principal, est introduite par un assureur contre un autre assureur n’étant pas couverte par ladite section, l’article 6, point 2, du règlement n° 44/2001 trouvera à s’appliquer à une telle demande pour autant que cette dernière relève des hypothèses visées à ladite disposition".

Bruxelles I bis (règl. 1215/2012)

CJUE, 21 janv. 2016, SOVAG, Aff. C-521/14

Motif 39 : "(…) le traitement, dans le cadre de la même procédure [en Finlande], de la demande originaire et d’une demande introduite par un tiers contre l’une des parties à cette procédure et étroitement liée à la première demande, est de nature à favoriser les objectifs susvisés [de limitation des procédures concurrentes et d'admission de fors complémentaires du forum rei] dans une situation où une action a été introduite par la personne lésée contre l’assureur du responsable des dommages et où un autre assureur, qui a déjà indemnisé partiellement cette personne de ces dommages, cherche à obtenir du premier assureur le remboursement de cette indemnisation".

Motif 41 : "Par ailleurs, la Cour a déjà eu l’occasion de relever, dans le cadre de la convention [de Bruxelles], que l’action introduite par l’assuré à l’encontre de l’assureur pour le dédommagement des conséquences de l’accident et l’action par laquelle ledit assureur attrait à la cause, à des fins de dédommagement, un autre assureur réputé avoir couvert le même événement devaient être considérées, respectivement, comme une demande originaire et une demande en garantie au sens de l’article 6, point 2, de la même convention (voir, en ce sens, arrêt GIE Réunion européenne e.a., C‑77/04, EU:C:2005:327, point 27)".

Motif 45 : "L’article 6, point 2, du règlement n° 44/2001 exigeant un lien entre, d’une part, la demande originaire et, d’autre part, la demande en intervention ou la demande en garantie qui y sont visées, il appartient au juge national saisi de la demande originaire de vérifier l’existence d’un tel lien, en ce sens qu’il doit s’assurer que la demande en intervention ou la demande en garantie ne visent pas qu’à traduire le défendeur hors de son tribunal (voir, en ce sens, arrêt GIE Réunion européenne e.a., C‑77/04, EU:C:2005:327, points 30 et 32)".

Motif 46 : "À cet égard, le fait qu’une disposition nationale, telle que l’article 5, deuxième alinéa, du chapitre 18 du code de procédure judiciaire [finlandais], soumette la faculté pour un tiers d’introduire une action dans la cadre d’une procédure juridictionnelle déjà ouverte à la condition que cette action entretienne un lien avec la demande originaire constitue, assurément, un élément de nature à éviter un détournement de l’article 6, point 2, du règlement n° 44/2001".

Dispositif (et motif 47) : "L’article 6, point 2, du règlement (CE) n° 44/2001 (…), doit être interprété en ce sens que son champ d’application s’étend à une action qu’un tiers a introduite, conformément aux dispositions de la législation nationale, contre le défendeur à la procédure originaire et ayant pour objet une demande étroitement liée à cette demande originaire, visant à obtenir le remboursement d’indemnités versées par ce tiers au demandeur à ladite procédure originaire, à la condition que cette action n’ait pas été formée que pour traduire ledit défendeur hors de son tribunal".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

Civ. 1e, 20 janv. 2004, n° 01-00415 [Conv. Bruxelles, art. 10]

Motif : "(...) qu'en retenant qu'en application de l'article 10, 1, de la Convention de Bruxelles (...), la société Milano Assicurazioni pouvait être attraite devant le tribunal saisi de l'action de la personne lésée contre l'assuré dès lors qu'elle relevait que cet assureur ne démontrait d'aucune manière la volonté de la société Mercurio Autovetture de le soustraire artificiellement à son juge naturel, la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

Civ. 1e, 10 mai 2006, n° 01-11229 [Conv. Bruxelles, art. 6.2 et 11]

Motifs : "Vu l'arrêt rendu le 26 mai 2005 (C-77/04) par la Cour de justice des communautés européennes ; Vu les articles 6,2 et 11 de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, modifiée (...) ; Attendu qu'un appel en garantie entre assureurs, fondé sur un cumul d'assurances, n'est pas soumis aux dispositions de la section 3 du titre II de la Convention du 27 septembre 1968 ; que l'article 6,2 de cette convention n'exige, entre la demande originaire et l'appel en garantie, l'existence d'aucun lien autre que celui qui est suffisant pour constater l'absence de détournement de for".

"Qu'en se prononçant [sur l'application de l'article 11 de la convention au cas d'espèce, ainsi que sur la non-aplication de l'article 6,2 de la convention], alors, d'une part, que les règles spéciales de compétence de la section 3 du titre II de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 en matière d'assurance, fondées sur le souci de protéger l'assuré, réputé être la partie la plus faible économiquement et juridiquement, ne doivent pas être étendues à des personnes pour lesquelles cette protection ne se justifierait pas, comme c'est le cas des assureurs dans leurs rapports entre professionnels, de sorte que les dispositions de l'article 11 de cette convention n'étaient pas applicables à l'appel en garantie formé contre la société Zurich seguros, et alors, d'autre part, qu'en exigeant la preuve d'un lien de connexité entre la demande originaire et l'appel en garantie, ce qui constitue une condition non prévue par l'article 6,2 de la Convention, la cour d'appel a violé les textes susvisés".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 26 mai 2005, GIE Réunion européenne, Aff. C-77/04 [Conv. Bruxelles]

Aff. C-77/04Concl. F.G. Jacobs 

Motif 17 : "(...), il ressort de l’examen des dispositions de [la section 3, titre II de la convention], (...), que, en offrant à l’assuré une gamme de compétences plus étendue que celle dont dispose l’assureur et en excluant toute possibilité de clause de prorogation de compétence au profit de ce dernier, elles ont été inspirées par un souci de protection de l’assuré, lequel, le plus souvent, se trouve confronté à un contrat prédéterminé dont les clauses ne sont plus négociables et constitue la personne économiquement la plus faible (arrêts du 14 juillet 1983, Gerling e.a., 201/82, Rec. p. 2503, point 17, et du 13 juillet 2000, Group Josi, C-412/98, Rec. p. I-5925, point 64)".

Motif 18 : "Cette fonction de protection de la partie au contrat réputée économiquement plus faible et juridiquement moins expérimentée implique cependant que l’application des règles de compétence spéciale prévues à cet effet par la convention ne soit pas étendue à des personnes pour lesquelles cette protection ne se justifie pas (arrêt Group Josi, précité, point 65)".

Motif 20 : "(...) aucune protection spéciale ne se justifie s’agissant des rapports entre des professionnels du secteur des assurances, dont aucun d’entre eux ne peut être présumé se trouver en position de faiblesse par rapport à l’autre".

Motif 22 : "En effet, les auteurs de la convention se sont fondés sur la prémisse que les dispositions de la section 3 du titre II de celle-ci ne seraient applicables qu’aux rapports caractérisés par une situation de déséquilibre entre les intervenants et ont établi, pour cette raison, un régime de compétences spéciales favorable à la partie considérée comme économiquement la plus faible et juridiquement la moins expérimentée. Au demeurant, l’article 12, point 5, de la convention a exclu d’un tel régime protecteur les contrats d’assurance dans lesquels l’assuré bénéficie d’une puissance économique importante".

Motif 23 : "Il est ainsi conforme tant à la lettre qu’à l’esprit et à la finalité des dispositions en cause de conclure que celles-ci ne sont pas applicables aux rapports entre assureurs dans le cadre d’un appel en garantie".

Dispositif 1) (et motif 24) : "Un appel en garantie entre assureurs, fondé sur un cumul d’assurances, n’est pas soumis aux dispositions de la section 3 du titre II de la convention du 27 septembre 1968 (...)".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 26 mai 2005, GIE Réunion européenne, Aff. C-77/04 [Conv. Bruxelles]

Aff. C-77/04Concl. F.G. Jacobs 

Motif 28 : "[En vertu du] rapport sur la convention concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, élaboré par M. Jenard (JO 1979, C 59, p. 1, 27)" (…), "la demande en garantie est définie comme l’action "qui est intentée contre un tiers par le défendeur à un procès en vue d’être tenu indemne de conséquences de ce procès"".

Motif 29 : "L’applicabilité, en l’espèce, de l’article 6, point 2, de la convention reste néanmoins soumise au respect de la condition exigeant que la demande en garantie ne soit pas formée que dans le but de traduire hors de son tribunal celui qui a été appelé".

Motif 30 : "Or, ainsi que l’ont souligné, d’une part, la Commission et, d’autre part, M. l’avocat général aux points 32 et 33 de ses conclusions, l’existence d’un lien entre les deux demandes en cause au principal est inhérente à la notion même de demande en garantie".

Motif 31 : "En effet, il existe une relation intrinsèque entre une action dirigée contre un assureur en vue de l’indemnisation des conséquences d’un événement couvert par celui-ci et la procédure par laquelle cet assureur cherche à faire contribuer un autre assureur réputé avoir couvert le même événement".

Motif 32 : "Il appartient au juge national saisi de la demande originaire de vérifier l’existence d’un tel lien, en ce sens qu’il doit s’assurer que la demande en garantie ne vise pas qu'à traduire le défendeur hors de son tribunal".

Motif 33 : "Il s’ensuit que l’article 6, point 2, de la convention n’exige l’existence d’aucun lien autre que celui qui est suffisant pour constater l’absence de détournement de for".

Dispositif 2 : "L’article 6, point 2, de ladite convention est applicable à un appel en garantie, fondé sur un cumul d’assurances, pour autant qu’il existe un lien entre la demande originaire et la demande en garantie permettant de conclure à l’absence de détournement de for".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

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