Etablissement

Cass. (1re ch.), 27 juin 2008, n° C.07.0469.F

Motif : "En vertu de l’article 3.2. du règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures d’insolvabilité, lorsque le centre des intérêts principaux du débiteur est situé sur le territoire d’un Etat membre, les juridictions d’un autre Etat membre ne sont compétentes pour ouvrir une procédure d’insolvabilité à l’égard de ce débiteur que si celui-ci possède un établissement sur le territoire de cet autre Etat membre. 

L’article 2, h), de ce règlement dispose que l’établissement visé par l’article 3.2. s’entend de tout lieu d’opérations où le débiteur exerce de façon non transitoire une activité économique avec des moyens humains et des biens.

Le demandeur faisait valoir en conclusions qu’il avait disposé d’un établissement en Belgique en invoquant son inscription à la Banque-Carrefour des entreprises, son immatriculation à l’O.N.S.S. et à la T.V.A., le recours à un secrétariat social d’employeurs belge, la réception de courriers en Belgique, une gestion de ses affaires en France au départ de son siège d’entreprise belge, un important passif issu des productions de créances de créanciers belges et la location d’un entrepôt et d’un bureau en Belgique.

Pour décider que le demandeur ne disposait pas en Belgique d’un établissement, l’arrêt se borne à énoncer que le demandeur « reconnaît [...] qu’il n’a jamais exercé d’activité que sur le territoire de la France » et omet de vérifier l’ensemble des éléments objectifs que le demandeur avait soumis à la cour d’appel au soutien de l’existence d’un établissement au sens du règlement européen.

L’arrêt ne justifie, dès lors, pas légalement sa décision".

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

CA Bruxelles (9e ch.), 17 nov. 2009, n° 2009/QR/33

Motif : "Compte tenu de son caractère secondaire, il n'y a pas lieu d'examiner si les conditions mises au déclenchement d'une « procédure collective » (soit en droit belge, la faillite) sont réunies puisque par la procédure principale, la question de l'insolvabilité, a déjà été tranchée.

Pour constituer un établissement, il faut disposer notamment d'une certaine stabilité et gérer cet établissement dans le pays de l'éventuelle faillite secondaire. Il doit y constituer un centre d'affaires. Un bureau ouvert pour négocier et conclure un contrat ne répond pas à cette définition, de même qu'une boîte postale ou la simple localisation de biens. Il ne faut pas qu'il apparaisse qu'il s'agit d'une simple façade sans existence.

En l'espèce

A l'examen de ces pièces, il peut être considéré comme acquis le caractère non-transitoire et non-éphémère de la démarche en Belgique de M. V., notamment par ses immatriculations et la location de bâtiments à usage de bureaux et entrepôts.

En effet, la notion d'établissement, au sens du Règlement, ne se réduit pas uniquement à l'exécution, ou non, de chantiers en Belgique. Dès lors que M. V. prouve, comme en l'espèce, non seulement une gestion administrative, mais aussi une activité économique réellement établie en Belgique, notamment par les éléments qu'il invoque et les pièces qu'il dépose, il établit disposer d'un établissement sur le territoire belge au sens du règlement 1346/2000.

Il est donc fondé à invoquer les dispositions dudit règlement sur la faillite secondaire".

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

CA Riom, 10 sept. 2008, n° 06/01086

RG n° 06/01086

Motif : "Attendu que le présent litige porte sur l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire en France d'une société de droit luxembourgeois en application du règlement (CE) n° 1346 / 2000 (...) ;

Que l'article 3.1 énonce que 'Les juridictions de l'Etat membre sur le territoire duquel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur sont compétentes pour ouvrir la procédure d'insolvabilité. Pour les sociétés et personnes morales, le centre des intérêts principaux est présumé, jusqu'à preuve contraire, être le lieu du siège statutaire' ; Que la notion de 'centre des intérêts principaux' est définie par le règlement comme devant 'correspondre au lieu où le débiteur gère habituellement ses intérêts et qui est donc vérifiable par les tiers';

Que le règlement fait donc primer le principe de réalité en faisant du siège statutaire une simple présomption laissant au tribunal saisi le pouvoir de vérifier la localisation effective du centre des intérêts principaux déterminant les règles de compétence et par suite la législation applicable ;

Attendu en l'espèce qu'il est constant que la SA PRO-TECH, créée le 1er août 2001, a fait l'objet d'une immatriculation au registre du commerce de Luxembourg le 27 août 2001 puis d'un changement de son siège social, toujours à Luxembourg mais au [...], publié le 13 novembre 2001 ;

Qu'il est établi par les pièces produites par Monsieur l'Inspecteur Départemental des Impôts qu'elle exerçait en fait son activité illicite de vente de détecteurs de radars dans les locaux de la société ACCORD sis [...], laquelle lui fournissait également le matériel de bureau et le matériel informatique moyennant rémunération, tel que cela résulte des documents comptables et commerciaux saisis, de l'ouverture par son dirigeant de fait, M. B., de deux comptes bancaires utilisés pour encaisser les recettes, et de sa signature du contrat COLIPOSTE destiné à l'exploitation des marchandises ; Que par contre les renseignements obtenus au Luxembourg démontrent que M. B. était inconnu des administrations fiscales et sociales de ce pays, que la SA PRO-TECH a déclaré aux services fiscaux luxembourgeois n'avoir réalisé aucun chiffre d'affaires en 2001 et qu'à la fin du mois d'octobre 2002, elle n'avait souscrit aucune déclaration bien qu'elle soit soumise au régime trimestriel ;

Qu'il doit être déduit de ces éléments que la fixation officielle au Luxembourg du siège social de la SA PRO-TECH constitue une opération fictive de nature à masquer une activité effective en France avec un établissement stable à CLERMONT-FERRAND ; Que le fait que cet établissement, non détenteur de la personnalité morale, n'ait pas été immatriculé n'enlève rien au fait qu'il constituait en réalité le centre des intérêts principaux de la SA PRO-TECH ;

Attendu qu'il s'ensuit que le tribunal de commerce de CLERMONT-FERRAND avait bien compétence pour être saisi en ouverture d'une procédure dite 'principale' de liquidation judiciaire et qu'il convient en conséquence d'appliquer la loi française tel que prévu par l'article 4 du règlement". 

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

CJCE, 9 dec. 1987, Schotte, Aff. 218/86 [Conv. Bruxelles]

Aff. 218/86Concl. G. Slynn 

Motif 15 : "Les tiers qui font leurs affaires avec l'établissement agissant en tant que prolongement l'une autre société doivent pouvoir s'en remettre à l'apparence ainsi créée et considérer cet établissement comme un établissement de cette autre société, même si, du point de vue du droit des sociétés, les deux sociétés sont indépendantes l'une de l'autre".

Motif 16 : "Le lien de rattachement étroit entre la contestation et la juridiction qui est appelée à en connaître s'apprécie non seulement sur la base des relations juridiques existant entre des personnes morales établies dans différents États contractants, mais également en fonction de la façon dont ces deux entreprises se comportent dans la vie sociale et se présentent vis-à-vis des tiers dans leurs relations commerciales".

Dispositif : "L'article 5, point 5, de la convention du 27 septembre 1968 (…) doit être interprété en ce sens qu'il s'applique à un cas où une personne morale établie dans un État contractant tout en n'exploitant pas une succursale, agence ou établissement dépourvu d'autonomie dans un autre Etat contractant, y exerce néanmoins ses activités au moyen d'une société indépendante portant le même nom et ayant la même direction, qui agit et conclut des affaires en son nom et dont elle se sert comme d'un prolongement".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 18 mars 1981, Blanckaert et Willems, Aff. 139/80 [Conv. Bruxelles]

Aff. 139/80Concl. G. Reischl 

Motif 12 : "Il résulte des considérations de ces deux arrêts [De Bloos et Somafer], et en particulier du critère en vertu duquel une "succursale, agence ou autre établissement" au sens de l'article 5, n° 5, doit apparaître aux yeux des tiers et de façon aisément discernable comme un prolongement d'une maison mère, que le lien de soumission à la direction et au contrôle de cette maison mère n'est pas réalisé lorsque le représentant de la maison mère peut "librement organiser l'essentiel de son activité et déterminer son temps de travail" (...) sans que la maison mère puisse lui donner des instructions à cet égard; qu'en même temps il lui est loisible de représenter plusieurs firmes qui se font concurrence dans la production ou la commercialisation de produits identiques ou similaires et enfin qu'il ne participe pas effectivement au règlement et à l'exécution des affaires, mais se borne, pour l'essentiel, à transmettre des commandes à la firme qu'il représente. Cette triple circonstance exclut qu'une firme qui réunit ces caractéristiques puisse être qualifiée de centre d'opérations qui se manifeste de façon durable vers l'extérieur comme le prolongement d'une maison mère".

Dispositif : "Un agent commercial (intermédiaire) indépendant, en ce sens qu'il est, en vertu de son statut légal, libre d'organiser l'essentiel de son activité et de déterminer le temps de travail qu'il consacre à une entreprise qu'il accepte de représenter, à qui l'entreprise qu'il représente ne peut interdire de représenter en même temps plusieurs firmes concurrentes dans le même secteur de production ou de commercialisation et qui, en outre, se borne à transmettre des commandes à la maison mère, sans participer ni à leur règlement ni à leur exécution, ne réunit pas les caractéristiques d'une succursale, agence ou autre établissement au sens de l'article 5, n° 5, de la convention du 17 septembre 1968 (...)".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 6 oct. 1976, De Bloos, Aff. 14/76 [Conv. Bruxelles]

Aff. 14/76Concl. G. Reischl

Motif 20 : "Un des éléments essentiels qui caractérisent les notions de succursale et d'agence est la soumission à la direction et au contrôle de la maison mère". 

Motif 21 : "En ce qui concerne la notion d'"établissement" figurant dans ledit article, il ressort tant du but que de la lettre de cette disposition qu'une telle notion repose, dans l'esprit de la Convention, sur les mêmes éléments essentiels que ceux de succursale ou d'agence". 

Dispositif 2 : "Le concessionnaire d'une exclusivité de vente ne peut être considéré comme étant à la tête d'une succursale, d'une agence, ou d'un établissement de son concédant, au sens de l'article 5, 5°, de la Convention du 27 septembre 1968, lorsqu'il n'est soumis ni à son contrôle ni à sa direction".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 6 avril 1995, Lloyd's Register of Shipping, Aff. C-439/93 [Conv. Bruxelles]

Aff. C-439/93Concl. M. B. Elmer 

Motif 16 : "La lettre de l'article 5, point 5, de la convention n'exige nullement que les engagements négociés par une succursale soient exécutés dans l'État contractant où elle est établie pour relever de son exploitation".

Motif 17 : "Comme l'article 5, point 1, permet déjà au demandeur de porter un litige en matière contractuelle devant la juridiction du lieu d'exécution de l'obligation servant de base à sa demande, l'article 5, point 5, ferait double emploi avec cette disposition, s'il s'appliquait uniquement aux engagements pris par la succursale qui doivent s'exécuter dans l'État contractant où celle-ci est établie. Tout au plus créerait-il, dans ce cas, un second chef de compétence spéciale lorsque, à l'intérieur de l'État contractant de la succursale, le lieu d'exécution de l'obligation litigieuse est situé dans un ressort judiciaire autre que celui de la succursale".

Motif 20 : "Il n'existe pas nécessairement de lien étroit entre l'entité avec laquelle un client négocie et passe une commande et le lieu où celle-ci sera exécutée. Partant, des engagements peuvent relever de l'exploitation d'un établissement secondaire au sens de l'article 5, point 5, de la convention, alors même qu'ils doivent être exécutés en dehors de l'État contractant de celui-ci, le cas échéant, par un autre établissement secondaire".

Dispositif : "La notion de "contestation relative à l'exploitation d'une succursale, d'une agence ou de tout autre établissement ..." visée à l'article 5, point 5, de la convention du 27 septembre 1968 (…) ne suppose pas que les engagements litigieux pris par la succursale, au nom de la maison mère, doivent être exécutés dans l'État contractant où la succursale est établie".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 22 nov. 1978, Somafer, Aff. 33/78 [Conv. Bruxelles]

Aff. 33/78Concl. H. Mayras 

Motif 11 : "Compte tenu de ce que les notions visées [agence, succursale ou autre établissement] ouvrent la faculté de déroger au principe général de compétence de l'article 2 de la convention, leur interprétation doit permettre de déceler sans difficulté le lien de rattachement particulier qui justifie cette dérogation; que ce lien de rattachement spécial concerne (…) le rapport qu'il y a entre l'entité ainsi localisée et l'objet du litige dirigé contre la maison mère, établie dans un autre État contractant".

Motif 13 : "Il est nécessaire que l'objet du litige concerne l'exploitation de la succursale, de l'agence ou de tout autre établissement ; que cette notion d'exploitation comprend, d'une part, les litiges portant sur les droits et obligations contractuels ou non contractuels relatifs à la gestion proprement dite de l'agence, de la succursale ou de l'établissement eux mêmes, tels que ceux relatifs à la location de l'immeuble où ces entités seraient établies ou à l'engagement sur place du personnel qui y travaille ; que, d'autre part, elle comprend également ceux relatifs aux engagements pris par le centre d'opérations ci-dessus décrit au nom de la maison mère et qui doivent être exécutés dans l'État contractant où ce centre d'opérations est établi, ainsi que les litiges relatifs aux obligations non contractuelles qui trouveraient leur origine dans les activités que la succursale, l'agence ou tout autre établissement, au sens ci-dessus déterminé, a assumé au lieu où il est établi pour compte de la maison mère". 

Dispositif 3 : "La notion "d'exploitation" comprend :

— les litiges portant sur les droits et obligations contractuels ou non contractuels relatifs à la gestion proprement dite de l'agence, de la succursale ou de l'établissement eux-mêmes, tels que ceux relatifs à la location de l'immeuble où ces entités seraient établies ou à l'engagement sur place du personnel qui y travaille ;

— les litiges relatifs aux engagements pris par le centre d'opérations ci-dessus décrit au nom de la maison mère et qui doivent être exécutés dans l'État contractant où ce centre d'opérations est établi, ainsi que les litiges relatifs aux obligations non contractuelles qui trouveraient leur origine dans les activités que la succursale, l'agence ou tout autre établissement, au sens ci-dessus déterminé, a assumé au lieu où il est établi pour compte de la maison mère".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 22 nov. 1978, Somafer, Aff. 33/78 [Conv. Bruxelles]

Aff. 33/78Concl. H. Mayras 

Motif 8 : "La portée et les limites de la faculté réservée au demandeur par l’article 5, chiffre 5, sont fonction de l’appréciation des facteurs particuliers qui, soit dans les relations entre une maison mère et ses succursales, agences ou autres établissements, soit dans les relations entre une de ces dernières entités et des tiers, font apparaître le lien de rattachement spécial, justifiant, en dérogation à l’article 2, l’option accordée audit demandeur ; qu’il s’agit, par définition, de facteurs qui concernent deux entités établies dans des Etats contractants différents, mais qui, malgré cela, doivent pouvoir être appréciées de façon identique, qu’ils soient considérés du point de vue de la maison mère, de celui du (ou des) prolongement(s) que cette maison mère a établi(s) dans d’autres Etats membres ou encore du point de vue des tiers avec lesquels, à travers ces prolongements, sont nés des relations juridiques ; que, dans ces circonstances, le souci d’assurer la sécurité juridique ainsi que l’égalité des droits et obligations des parties, en ce qui concerne la faculté de déroger à la règle de compétence générale de l’article 2, impose une interprétation autonome et, dès lors, commune à l’ensemble des Etats contractants, des notions visées à l’article 5, chiffre 5, de la convention et qui font l’objet de la demande préjudicielle".

Dispositif 1 : "Le souci d'assurer la sécurité juridique ainsi que l'égalité des droits et obligations des parties, en ce qui concerne la faculté de déroger à la règle de compétence générale de l'article 2, impose une interprétation autonome et, dès lors, commune à l'ensemble des États contractants, des notions visées à l'article 5, chiffre 5, de la convention". 

Dispositif 2 : "La notion de succursale, d'agence ou de tout autre établissement implique un centre d'opérations qui se manifeste d'une façon durable vers l'extérieur comme le prolongement d'une maison mère, pourvu d'une direction et matériellement équipé de façon à pouvoir négocier des affaires avec des tiers, de telle façon que ceux-ci, tout en sachant qu'un lien de droit éventuel s'établira avec la maison mère dont le siège est à l'étranger, sont dispensés de s'adresser directement à celle-ci, et peuvent conclure des affaires au centre d'opérations qui en constitue le prolongement".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

Com., 16 nov. 2010, n° 09-16572

Motif : "le règlement (CE) n° 1346/2000 du 29 mai 2000 (…), dont l'article 21 ne prévoit la publicité de la décision ouvrant la procédure dans les autres États membres qu'à la requête du syndic ou sur décision de ces autres États, mais à la condition, dans ce second cas, que le débiteur, et non pas le créancier, y ait un établissement, renvoie, par son article 4, § 2 h), au droit interne de l'État d'ouverture pour la détermination de l'ensemble des règles relatives à la production des créances et à ses suites ; qu'il résulte des dispositions, ainsi rendues applicables, de l'article L. 622-26, alinéa 3, du code de commerce dans leur rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, que le délai de l'action en relevé de forclusion court à compter de la publication du jugement d'ouverture, sans distinction selon le lieu d'établissement, en France ou à l'étranger, du créancier".

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

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